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Liste par auteurs & titres dans Kronik list

lundi 24 décembre 2018

354: 'Des corps en silence' de Valentine Goby

Genre : dissection du couple au scalpel


Histoire
Roman à deux voix / voies, deux détresses féminines à deux époques différentes.
Henriette et Claire.
Toutes les deux face aux doutes, une qui lutte en 1914 pour rester celle que Joseph désire, l'autre qui ne peut faire le deuil d'une vie "plus grande que ça" et ne ressent plus rien pour son mari...



Impressions
Désir, désenchantement, jalousie, passion, ... le kaléidoscope des sentiments est mis à nu autour d'un dénominateur commun, l'amour charnel éteint.

'Ce serait bon que ce lieu ressemble à Henriette, à quelqu'un, une pièce vivante et lacérée, marquée comme l'est toute peau, toute écorce.'

L'écriture est belle, ciselée.
Récit plutôt féminin, fouillant la psychologie de femmes aimantes.

Un roman de la désillusion, de la mort de la passion. Un peu lent et long.

vendredi 21 décembre 2018

353: 'le roi des scarabées' de Anne-Caroline Pandolfo & Terkel Risbjerg

Genre :  épopée romanesque dans le Danemark de la fin du 19ième siécle


Histoire
Aksel est né dans une famille de riches propriétaires terriens dans le Danemark de la fin du XIXe siècle. Il rêve de devenir poète. Mais son destin risque d'être source de désenchantement...

Impressions
Énorme coup de cœur pour ce très beau roman graphique.
Poésie fantastique au début, d'un univers onirique en osmose avec la nature qu'Aksel, son ami Frederik et son entourage inventent et apprivoisent.
Puis Aksel croisent quatre femmes, quatre Muses aux caractères affirmés. Sa mère, sa cousine Laurine, une jeune femme moderne Sofie, et enfin l'épouse de son meilleur ami Frederik. Une errance initiatique assez douloureuse, digne d'un Dostoïevski.


Le graphisme noir et blanc est maîtrisé, très efficace, somptueux souvent, parfaitement adapté au récit. De grands aplats noirs poétiques, des paysages de neige envoûtants, des tableaux féeriques et magiques.





Romantique, sombre et poétique. Superbe !!!

jeudi 20 décembre 2018

352: 'Le règne du vivant' d'Alice Ferney

Genre : éco-centrique éco-guerrier


Histoire
Un journaliste norvégien photographe - caméraman embarque à bord de l'Arrowhead, un navire piloté par Magnus Wallace qui lutte contre la pêche illégale en mer. Un homme qui se bat, jusqu'à la mort.


Impressions
Un roman maritime grave où les thèmes essentiels sont abordés.
De l'urgence 
'Quatre cents zones marines sont déclarées mortes. Les grands prédateurs disparaissent. Nous léguons à nos enfants un océan où des modèles réduits n'ont pas le temps de grandir. Les espèces protégées ne le sont qu'en théorie. La pêche pirate est si gigantesque et profitable que l'extinction est une affaire de quelques années. Le poisson n'est plus l'être vivant universel du globe, éternel dans toutes les eaux. L'infini ou l'inépuisable sont des idées fausses qu'il faut de toute urgence nous ôter de la tête.'

De la justification de ce combat d'actions, surtout dans un contexte médiatique dominé par les acteurs du massacre de la planète.
'La disqualification est l'arme majeure du terrorisme intellectuel qui règne depuis quelques années. Il y a l'idéologie dominante, ses ramifications, et tout le monde est prié de penser conformément. Mais cette pensée totalitaire est soumise aux grands intérêts et celui qui voudrait s'en libérer est descendu.'



De la considération juridique des animaux
'Les animaux ne sont pas des sujets mais ils ne peuvent pas être utilisés et jetés comme des objets. Ils pourraient être d'ailleurs des sujets sans être des personnes, et s'ils avaient des droits, il ne faudrait bien sûr pas les penser sur le modèle des nôtres. Nous ne pouvons plus traiter et consommer les animaux de la même façon qu'autrefois. Nous savons que nous dépendons d'eux. Nous avons évolué avec eux. Nous sommes advenus grâce à eux. Nous avons acquis le pouvoir de les détruire. Nous devons légiférer pour eux.'

Le personnage de Magnus à la tête de l'association Gaïa est inspiré de l'activiste Paul Watson, co-fondateur controversé de Greenpeace puis de Sea Shepherd, réputé pour sa détermination et ses offensives spectaculaires en faveur de la protection des mammifères marins .
Les Sea shepherd ont été arrêté le 30 août 2014 (soit 10 jours après la parution du livre) et les autorités ont laissé faire ce massacre annuel où une trentaine de dauphins pilotes ont été sauvagement exécutés sur les îles Feroe, au nom d'une tradition vieille de 1000 ans 

Le roman décrit avec poésie les océans, avec une écriture fine, parfois brute, pour faire écho à la brutalité de l'homme.
'Seul à la poupe, les avant-bras sur la rambarde, je filmais le sillage que laissait l’Arrowhead dans la surface à peine plissée. J’enfermais dans la boîte les boucles blanches de cette frise éphémère que traçait notre route dans l’indifférence de la mer.'



'Je revoyais l’œil dilaté de l'animal pendant qu'un braconnier découpait son aileron. J'avais détourné mon attention, anesthésiant mon regard, filmant presque en aveugle, et c'était le silence de la bête qui m'avait ébranlé.'

Je regrette l'absence d'un fil conducteur. Des chapitres relatant des opérations maritimes alternent avec la description des temps de conférences, d'interviews où on s'éloigne de l'action et perd en rythme. En dépit de l'évidente force du sujet, j'ai du me forcer à achever la lecture de ce livre, qui des fois tourne au reportage journalistique et à d'autres nous plonge dans des tableaux poétiques et vibrants de la nature.


Un plaidoyer engagé, pour une cause mondiale, sans pathos. Mais manque un petit zeste pour en faire un roman qui transporte. Comme par exemple un Animal doué de raison de Robert Merle.

lundi 10 décembre 2018

351: 'Un soir de décembre' de Delphine De Vigan

Genre :  comme un (roman) boomerang*

Histoire
Matthieu mène une vie confortable avec sa femme et ses deux enfants. Son premier roman écrit de manière impulsionnelle remporte un vif succès qui lui vaut de recevoir de nombreuses lettres. Parmi celles-ci, une l'intrigue et le trouble...

"Je suis immobile. Il m'arrive de penser que je suis l'immobilité même. Je conjugue le verbe attendre, j'en épuise les sens, sur tous les modes, sur tous les tons. J'attends le bus, j'attends mon heure, j'attends que tu viennes, j'attends mon tour, attends-moi, attends que je t'y reprenne, j'attends que jeunesse se passe, j'attends de pied ferme, j'attends le bon moment, tout vient à point à qui sait attendre, le train n'attendra pas, j'attends qu'il revienne, je l'attends comme le messie, ça attendra demain, qu'attends-tu de moi, je t'attendrai le jour et la nuit, j'attendrai toujours, je n'attends pas après toi, je n'attends pas d'enfant, j'attends qu'il m'appelle, j'attends qu'il me parle, en attendant mieux, je ne m'y attendais pas, surtout ne m'attends pas."



Impressions
On peut ne pas aimer le récit de ce roman, et en particulier être agacé par les questionnements 'métaphysiques' de personnes qui vivent confortablement.
Un blogueur donne son verdict en correspondance avec une citation du livre:
« Une histoire d'amour à la sauce rose, parsemée d'écueils dérisoires et d'heureuses coïncidences, de celles qui vous feraient croire que la vie peut couler à flots ». Quelle lucidité dans cet aveu, à lire page 68

D'autres pourront se sentir plongés dans un hymne à l'amour, au désir, une peinture d'un passage dans la vie où derrière l'apparent confort, peuvent naître des fragilités, des brisures, des nostalgies.
"Le style de Delphine de Vigan exsude la ferveur, l'intensité et l'urgence du désir. Au plus près du corps. A vif." Marie-Claire

Personnellement j'aime l'écriture vive et élégante de Delphine De Vigan. L'auteure sait transcrire avec finesse la sensualité, la solitude, l'amertume. Les chapitres sont courts et apportent de la respiration.

"Parfois la peau frémit, palpite, implore, parfois la peau appelle une main, n'importe quelle autre, une main inconnue, étrangère, ou bien est-ce la cicatrice, invisible, d'une caresse perdue"

Un roman aussi qui aborde frontalement la question de l'écriture, de l'inspiration qui peut surgir comme disparaître, du processus d'écriture et d'abandon du livre fini.

Un livre n'est jamais fini. Même imprimé, il continue à vivre, comme un organisme autonome, appelle les ratures, les précisions, il souffre de ses amputations, il attend réparation. Un livre est comme un amour blessé, lacunaire, il contient en lui ce qu'il aurait pu être et qu'il n'a pas été, cet impossible retour en arrière, ce qu'on aurait dû dire, ce qu'on aurait dû taire, il porte en lui la douleur d'avoir été abandonné.

Roman à la fois nostalgique et lumineux, à l'écriture pudique et subtile.


* rien à voir avec Daho, mais cette expression est présente dans un courrier de Sara à Mathieu...

samedi 8 décembre 2018

350: 'Hé cool, la Seine' de Cicéron ANGLEDROIT

Genre :  entracte intellectuel

Histoire
Cicéron, détective privé, accompagné de 2 Pieds Nickelés, enquête paresseusement sur la disparition du mari d'une cliente, entre deux visites chez des amis ou parties de jambes avec ses nombreuses maîtresses...

Impressions
Tout est prétexte à gags potaches.
Du titre, dérivé d'un Fred Vargas ('Coule la Seine')...
Du pseudo de l'écrivain (pourquoi pas PACARRE, déjà couru ?). L'auteur s'appelle Claude Picq.
De la numérotation des chapitres en anglais détourné, please...
De l'enquête sans grands enjeux, (et après tout l'auteur s'en fout, ce n'est qu'un prétexte)

Soit on aime, soit on déteste.
Personnellement je souris, ris parfois, mais franchement c'est comme un San Antonio, on peut s'en passer.

Policier loufoque, dans un décor banlieusard et une gouaille banlieusarde. Sympa mais pas incontournable.

mercredi 5 décembre 2018

349: 'A la lumière du petit matin' d'Agnès Martin Lugand

Genre : ...

Histoire
'À l'approche de la quarantaine, Hortense se partage entre son métier de professeur de danse et sa liaison avec un homme marié.  Jusqu'au jour où le destin la fait trébucher...'

Impressions
Contrairement au livre précédent:
- Je n'ai pas eu dès le début de cette lecture un sentiment de déjà-lu, je m'en serai souvenu.
- Le plaisir était très ténu, voire plutôt absent. C'est assez lent et mou, saturé de clichés (le bel amant qui lorsqu'il entre quelque part " son seul charisme irradiait une pièce"), de redites, de banalités.
- L'écriture est vraiment quelconque, avec des tentatives de traits poétiques qui font plouf !
- Le message ne m'inspire pas  d'émotion, même si l'auteure s'acharne à nous faire fondre de tristesse et d'empathie, pour l’héroïne blessée à la cheville et au cœur, pour cet homme solitaire qui échoue dans sa bastide du Lubéron, qui pleure et fuit les humains...

J'arrête là mes critiques, vous aurez compris que je n'apprécie pas, tout en reconnaissant que ce genre de roman peut plaire à certain(e)s, comme le prouve le fait qu'Agnès Martin-Lugand a déjà vendu plus deux millions d'exemplaires de sa littérature.
Sans doute ses lecteurs et lectrices apprécient de pouvoir se projeter personnellement dans les personnages, à partager les situations sentimentales décrites.
Ainsi par exemple une lectrice qui a beaucoup aimé écrit:
"Hortense est vraiment attachante, en tant que femme on se sent vraiment proche d'elle, par contre Aymeric est un beau modèle d'égoïsme, il ne pense qu'à lui et à son plaisir personnel. Sans vouloir juger car je pense qu'il aime sincèrement Hortense mais est incapable de faire un choix qui lui coûterait, je n'ai pas de sympathie pour le personnage."

Livre au récit sans relief qui m'a ennuyé, écriture banale, des répétitions, une construction linéaire...

mardi 4 décembre 2018

348: 'Pierre de Patience' de Syngué Sabour

Genre : grand déballage  pour soulager la souffrance, la colère, les humiliations

Histoire
Monologue d'une femme afghane qui veille sur un corps d'homme allongé, inerte, mourant.

Impressions
J'ai eu dès le début de cette lecture un sentiment de déjà-lu. Et en effet j'avais déjà parcouru ce roman, mais le plaisir est toujours là, tant l'écriture est belle et le message poignant.

Livre splendide, un des rares Goncourt (2008) auquel j'adhère à 100%.

mercredi 28 novembre 2018

347: 'profession du père' de Sorj Chalandon

Genre :  enfance volée 

Histoire
Emile, 12 ans, vit avec ses parents en province. Il raconte son quotidien dominé par son père, qu'il craint mais qui aussi le fascine, et qu'il aime...


Impressions
Violence des mots, pluies de coups, Emile et sa mère ne sont pas épargnés, le lecteur non plus. Pas de tout repos.
Une mère passive, murée dans le silence, qui tricote pendant que les 2 hommes jouent aux agents secrets dans le stade avec leurs talkie-walkies, qui accepte de dormir sur le paillasson du palier pour punition d'être sortie avec des amies, et qui serine 'Tu connais ton père'...
Un enfant maltraitée, qui vit un calvaire décrit avec pudeur mais dont on imagine la peau marquée par les tumeurs bleues, les coulures de sangs... Et ses crises d'asthme qu'il doit soigner avec son sirop...

Agent secret, conseiller des grands hommes politiques, footballeur, parachutiste, pasteur, espion, chanteur, professeur de judo ...
Mais surtout, manipulateur, mythomane, et violent...

En septembre, cette année-là, lorsque je suis rentré avec la feuille de renseignements, il était tendu. Profession du père ? Ma mère n'avait pas osé remplir le formulaire. Mon père avait grondé.
- Écris la vérité : "Agent secret." Ce sera dit. Et je les emmerde."

Une écriture sans pathos, directe, à l'écriture efficace et parfois poétique.

"Une secte minuscule avec son chef et ses disciples, ses codes, ses règlements, ses lois brutales, ses punitions. Un royaume de trois pièces aux volets clos, poussiéreux, aigre et fermé. Un enfer."

Pour le lecteur qui sait encaisser l'histoire d'un purgatoire familial, c'est un bouquin fort et poignant. Et semble-t-il avec une part d'autobiographie... Terrifiant.




INTERVIEW de SORJ CHALANDON
Donnez-vous raison à la critique qui cherche des traces autobiographiques dans « Profession du père », tout en confortant l’idée de laisser une place maîtresse à la fiction ?

J’ai un petit frère, Émile est seul. J’ai trois filles alors qu’Émile a un fils. Je ne suis pas restaurateur de tableau. Voilà ce qui fait le roman, la fiction. Le reste, tout le reste mis à part l’instant ou Émile lève l’arme sur son père, a fait partie de mon enfance, a construit ma vie. Comme Émile, je suis resté sans socle, sans transmission, sans cet amour qui arme et cuirasse. Comme Émile, je ne sais toujours pas la profession de mon père.

mardi 27 novembre 2018

346: 'Service clientèle' de Benoît Duteurtre

Genre :  « Entrer dans un monde absolument moderne »*

Histoire
"A travers la parabole d'un homme et son téléphone mobile, Benoît Duteurtre pourfend avec humour les travers de notre société occidentale, obsédée par le temps, le profit et la vitesse. Un roman bref, incisif et iconoclaste contre le diktat du "tout-communication".



Impressions
En dépit de son faible nombre de pages, c'est assez répétitif et c'est bien que ce soit court (le titre de la première page est sous-titré 'Roman bref')...
'La révolution numérique qui bouleverse nos sociétés ?' La leçon du roman est que la relation clientèle est dématérialisée, et finalement déshumanisée. Système kafkaïen, l'usager finit par abdiquer à l'usure. C'est l'ère du « service clientèle » dépourvu de tout sens du service. L'auteur finit par s'user lui même avec un final en délire complet...

Pamphlet sur notre société numérisée et dématérialisée. Aurait pu être drôle et incisif. C'est finalement assez ennuyeux et crispant.

*slogan de la compagnie impliquée dans ce récit.

dimanche 25 novembre 2018

345: 'Mamie Luger' de Benoît Philippon

Genre : les aveux d'une mamie qui décoiffe !

Histoire
La chaumière de Berthe, 102 ans, est prise d'assaut par une escouade de policiers. Elle est amenée dans les locaux du commissariat. L'inspecteur Ventura -André et non pas Lino- reçoit ses aveux au cours d'une garde-à-vue qui risque de durer...





Impressions
Langage fleuri et imagé de Berthe, une serial killer pas banale.
Cette garde à vue détricote les épisodes pas banals de la vie de cette femme centenaire qui manie le couteau et le Luger sans trembler !
C'est conté de manière sensible, cru parfois, drôle souvent.

"Et pour répondre à ta question, gamin, j'l'aimais, la petite. Et l'amour, ça a pas plus de sexe que d'couleur. Et si l'premier argument, tu l'comprends pas parce que t'es encore engoncé dans tes préjugés, le deuxième tu dois l'entendre. Hein, "Mouss"?"

Déjanté, loufoque, souvent drôle, un air de Tarantino ! Lecture divertissante.

vendredi 23 novembre 2018

344: 'Acide sulfurique' d'Amélie Nothomb

Genre : Très acide, voire mortel ... nausée

Histoire
Un jeu télé-réalité, où des hommes et des femmes sont enlevés puis enfermés, filmés, sous-surveillance de kapos, et enfin petit à petit exterminés...
Son nom : 'Concentration'...

Impressions
Vraiment Amélie Nothomb peut aller très loin, et là pour moi, elle a dépassé les limites, et même ses limites.

Certes ce roman dénonce la violence, l'infinie bêtise humaine que peuvent véhiculer certaines émissions télévisées.
Certes ce récit illustre la déshumanisation d'une période abjecte de l'histoire.

Mais c'est traité à la va-vite (l'auteure poussée à produire pour la rentrée littéraire de 2005 ?...) avec un format court, adressant des questions de notre humanité sans originalité ni profondeur. Les méchants sont très méchants, les gentils très gentils, l'héroïne très belle réussit à révéler le 'bon' enfoui chez une méchante, etc...

Mélanger 'télé-réalité' et camp de concentration était une idée morbide casse-gueule qui aurait demandé de la finesse. Échec. Les discussions tournent en rond, les propos sont naïfs, les personnages -même les gentils- ne créent pas d'empathie.

Non.
Plutôt lire Hunger Games, c'est largement plus subtil et prenant !

jeudi 22 novembre 2018

BD 'Carolina' de João Pinheiro & Sirlene Barbosa


Carolina de Jesús vivait dans la favela de Canindé, au nord de São Paulo. Femme noire mère élevant seul ses trois enfants, elle a surmonté la misère quotidienne par l'écriture. Découverte par un journaliste, elle a été l'un des plus grands phénomènes littéraires du Brésil en 1960, notamment avec son livre Quarto de Despejo. Réussite et déclin sont décrits en noir et blanc, sans concession, un témoignage sur une page d'histoire du Brésil.

Bd-documentaire, instructive mais qui ne m'a pas emporté.



samedi 17 novembre 2018

343: BD 'Les reflets changeants' de 'Aude Mermillaud


Encore un coup de cœur !
Une BD que je classe en roman car cette jeune auteure nous offre ici un vrai roman graphique de qualité.



Elsa 22 ans, jeune femme brillante et fraîchement diplômée, amoureuse d'un homme instable
Jean, 53 ans, séparé de sa femme, et amoureux inconditionnel de sa fille Aida
Emile, 79 ans, qui vit dans un monde de silence au sein de sa famille
3 destins qui se croisent dans Nice pendant quelques semaines d'été si bien rendues par les teintes lumineuses de ces pages.

Le graphisme est clair, sobre voire naïf, je dirai épuré et efficace, jouant des ombres et des luminosités avec maîtrise. Il sert parfaitement le récit mélancolique et plein de vie à la fois.
Sourires, regards, peu de dialogues, mais des petits riens qui rythment notre quotidien.
Des personnages humains, avec leurs fragilités et leurs chagrins. Mais aussi leurs joies, et les amitiés et leurs amours.

Un album vraiment touchant. Lumineux et doux-amer.

343: 'Les Nymphéas noirs' de Michel Bussi

Genre : tableau de nymphéas ensanglantés

Histoire
3 femmes: Une fillette, une institutrice et une vieille femme à Giverny.
3 modalités de mort: Jérôme Morval retrouvé assassiné d'un coup de couteau, le crâne défoncé et noyé.
Mari jaloux, amateur d'art ou enfant caché ?...


Tableau de Théodore Robinson,  père Trognon
Un tableau plusieurs fois cité dans ce roman


Impressions
Premier roman de Bussi que je lis.


La narratrice, la sorcière du moulin, joue la guide touristique de Giverny (*).
..Je longe le Parking et je me dirige vers le moulin des Chennevières. C'est là que j'habite. Je préfère rentrer avant la foule. Le moulin des Chennevières est de loin la plus belle bâtisse à proximité des jardins de Monet, la seule construite le long du ru, mais depuis qu'ils ont transformé la prairie en champ de tôles et de pneus je m'y sens comme une espèce en voie de disparition...

...Je finis par atteindre l'Hôtel Baudy. Les vitres de l'établissement le plus célèbre de Giverny sont occultés par des affiches...


Le style n'est pas transcendant mais vivant, l'intrigue est finement construite, les personnages sont sympathiques et le cadre de ce tableau nous fait découvrir avec plaisir ce haut lieu de pèlerinage culturel.

Gros Polar entraînant, de par la dimension historique de ce monument de la peinture 'Impressionniste', et surtout de par cette construction très intelligente de l'intrigue dont l'auteur nous dévoile les fils avec un final feu d'artifice !

J'avoue avoir eu des a priori négatifs mais je ne suis pas mécontent de cette lecture.

(*) Images trouvées sur le site:

https://sites.google.com/site/randolocfrancesuite/home/giverny-balade-dans-le-decor-de-nympheas-noirs


Très bon blog découvert en cherchant un commentaire sur ce polar:
http://lespolarsdemarine.over-blog.fr/2013/11/nymph%C3%A9as-noirs-de-michel-bussi.html

dimanche 11 novembre 2018

342: 'Le bleu du Lac' de Jean Mattern

Genre : Chant d'adieu

Histoire
Viviane Craig, la « Greta Garbo du piano » voyage en métro londonien pour se rendre à la cérémonie des funérailles de James Fletcher, célèbre critique musical...

'[...] voilà la quintessence de ma vie, ce qu'il en reste maintenant qu'il est parti et que je n'en saurai jamais plus sur son enfance dans le Nord, ses études de musique et cette découverte de la félicité à s'immerger dans une eau claire au milieu d'un lac dans les Alpes, il était plutôt avare de mots, même si nos conclaves lui ont donné le goût de la parole malgré tout, et à chaque bribe de sa vie d'avant qu'il me confiait je l'aimais un peu plus, c'est sans doute idiot mais c'est ainsi.'


Annecy, Le lac bleu peint par Paul Cézanne en 1896


Impressions
Derrière cette apparence modeste, cet air de rien, ce format chétif d'à peine plus de 100 pages, avec une couverture pastel neutre caractéristique de cet éditeur (Sabine Wespieser), se cache un texte bouleversant, vibrant, un magnifique mouvement musical porté par une soliste qui monologue.
Un monologue sans pause,  le temps d'un trajet amené à logiquement se clore par l'Intermezzo numéro 2 de Brahms.

Le flot de pensées est celui d'une femme douloureusement triste mais pas effondrée, oscillant entre la tentation de renoncer à jouer Brahms et celui d'au contraire faire ce dernier hommage à James...
[…] l'idée qu'on enferme définitivement ce visage dans le noir m'est insupportable, lui qui n'était que lumière […]

Elle livre ses pensées les plus profondes,l'attente et l'adoration, l'illicite, le sexe, le déchirement, ses amours, sa tristesse d'avoir aussi perdu sa fille Laura….
"... personne ne sera là pour décrire son visage quand il jouissait, cette main qu'il posait sur ma joue avec une tendresse infinie, une tendresse dont lui seul était capable, car elle n'était pas de ce monde."

En miroir de sa relation, elle évoque la liaison* de 13 ans débutées en 1947 entre Lady Edwina Mountbatten et le premier ministre indien Jawaharlal Nehru, le père de la nation indienne (''At the stroke of the midnight hour when the world sleeps, India will awake to life and freedom.')


Lord and Lady Mountbatten with Indian Prime Minister Jawaharlal Nehru

"faute d'avoir le courage de mettre fin à notre relation, combien de  tentatives avons-nous faites pour échapper à cet amour trop grand pour nous ? "

D'une traite, un faisceau de sensations et d'émotions, avec peu de points et encore moins de paragraphes.

Magnifique solo musical du verbe. De la complexité de sentiments. Avec subtilité mais sans minauderies. Avec émotion mais sans pathos.

* Film "Indian Summer", avec Hugh Grant & Cate Blanchett en tant que Lord et Lady Mountbatten.

samedi 3 novembre 2018

341: 'Le musée du silence' de Yôko Ogawa

Genre : Chut !


Histoire
Un jeune muséographe est embauché par une vieille femme acariâtre pour créer un musée. Ce musée exposera une collection d'objets hétéroclites, vestiges d'une intimité perdue. Mais chut ! Je ne peux en dire plus ….

Impressions
Les descriptions sont méticuleuses, la narration aussi.
Des objets répertoriés avec méthode, précaution.
Des échantillons biologiques observés au microscope, cadeau du frère du muséographe.

L'écriture est subtile, empreinte de poésie.
C'est un récit à lire en prenant son temps, sans bousculer le rythme. 
L'art du non dit est maîtrisé, les sentiments sont esquissés en ombre chinoise.


L'ambiance générale est étrange, voire oppressante.
Derrière l'apparence quelconque du village et des ses habitants, règne une atmosphère surnaturelle, de monde parallèle hors de la société, et de dangers aussi sous-jacents, à l'image de cet attentat et du meurtre d'une femme qui restent impunis...
Le décor contribue à cette ambiance : 
- le village est anonyme, sans particularité géographique, où le paiement des impôts est régi par la taille des oreilles ...
- un manoir aux pièces labyrinthiques, retiré du monde citadin...
- le monastère des prédicateurs du silence - encore le silence- atteint après avoir traversé en barque un marais aux eaux vertes...

"Il y a très longtemps, ces trous étaient utilisés pour faire le tri des contribuables. On pensait que le corps s'arrêtait un jour de grandir, mais que les os des oreilles continuaient toute la vie à se développer. C'est pourquoi ceux qui arrivaient à glisser leur oreille dans ces trous et entendre les bruits au travers n'étaient pas encore obligés de payer l'impôt. "

Le bizarre habite les personnages, la vieille dame bien sûr mais aussi la jeune fille qui assiste le muséographe.
Comme chez Murakami, un de mes auteurs favoris, la frontière entre réel et irréel est ténue, floue.
Et l’atmosphère s'appesantit au fil du récit...

Sur le thème de la transmission.  Un roman envoûtant, poétique. A déguster.

340: 'Menace sur nos libertés : Comment Internet nous espionne, comment résister' de Julian Assange

Genre : 'Ce livre est un cri d'alarme'


Histoire
Ce dialogue en forme d’avertissement entre Julian Assange et trois amis, Jérémie Zimmermann, Jacob Appelbaum, Andy Müller-Maguhn, spécialistes des nouveaux médias, militants pour un Internet libre, nous ouvre les yeux sur les dangers à exposer nos vies via Internet et nos téléphones portables, et nous donne les moyens pour résister. 



Impressions
Dialogue assez ouvert entre ces 4 experts, mais un échange structuré en chapitres comme la 'militarisation du cyberespace', 'Espionnage par le secteur privé', 'Censure'. 
Les échanges sont volontairement rendus accessibles aux non-experts mais il faut reconnaître qu'ils font référence à des nombreuses technologies (projet Tor par exemple) ou affaires politico-judiciaires qui rendent moins cette discussion accessible (presque 50 pages de notes à la fin du livre avec de nombreuses références).

Ils donnent des exemples précis, et explicitent clairement par exemple la technologie de surveillance stratégique où '10 millions de dollars suffisent à acheter une unité où stocker définitivement les interceptions massives d'un pays de taille moyenne.'...

Appels téléphoniques, SMS, chats, forums, Google, Facebook circulent sans aucune protection (pas de cryptage), et peuvent donc être interceptées par tous types d’organisations : entreprises privées, États, services secrets. Le marché de la vente de systèmes de surveillance des données « récoltées » sur Internet est en croissance exponentielle depuis que le concept de « cloud space » s’est imposé. 

« Google sait avec qui tu communiques, qui tu connais, ce que tu recherches, il connaît éventuellement ton orientation sexuelle et tes croyances religieuses et philosophiques. »

A travers un simple paiement par carte VISA, nous laissons une traçabilité sur nos habitudes. Ces renseignements vont toujours aux USA car tous les systèmes y aboutissent. 

« Le fait que la cryptographie soit soumise à régulation est intéressante. Il y a l'Arrangement de Wassenaar, d'application internationale, c'est-à-dire qu'on n'a pas le droit d'exporter de technologies de cryptage vers les pays déclarés "mal intentionnés" ou, pour une raison ou une autre, problématiques, ce qui va dans le sens de la protection contre la technologie de surveillance. 
Mais si tu vends du matériel de surveillance, tu peux vendre ces technologies à l'étranger [...]
Et même si l'on a affaire à des pays mal intentionnés et qu'on leur fournit du matériel de surveillance pour faire de vilaines choses, on en tirera profit, parce qu'on apprendra ce qu'ils écoutent, ce qu'ils redoutent, ou qui sont les principaux opposants au gouvernement du pays [...]

Un livre d'éveil aux menaces, voire aux mises à mal déjà effectives, de nos libertés politiques et individuelles. Mise en garde incontestable, même si le personnage de Julian Assange est plus ambigu. 

jeudi 1 novembre 2018

Citations



Les bons artistes copient, les grands artistes volent.

Pablo Picasso

mardi 23 octobre 2018

339: 'La Trace' de Richard Collasse

Genre : sur les traces d'un Yubukiri* non tenue

Histoire
Le narrateur, la cinquantaine, est bien établie depuis 30 ans au Japon. Président d'une filiale de maison de luxe Française à Tokyo, marié à une japonaise qu'il adore, une belle maison à Kamakura.
Il reçoit à son bureau une lettre anonyme écrite en japonais... "Ce fut un coup de massue."


Impressions
Lecture envoûtante.
A priori un roman semi-autobiographique.
Récit de deux histoires qui se déroulent en parallèle : le parcours initiatique d'un jeune Français à la découverte du Japon 35 ans plus tôt et le présent du narrateur déstabilisé par cette lettre.
A travers ces 2 temporalités l'auteur tisse une histoire d'amour, une découverte de la psychologie, de la sociologie et culture japonaise très fine, un témoignage sur les premières traces que jeune ce narrateur a semées au cours de sa découverte du Japon.

« le passé, c'est la trace qu'on laisse derrière soi. »


Amoureux du Japon, cependant il ne peint pas un eldorado culturelle magnifié, il en décrit les subtilités et la gentillesse mais aussi l'herméticité et la complexité.
« Étranger à ce peuple, à ses mœurs, à sa culture, à l'expression même de ses sentiments, maladroit, pataud, aveugle les yeux ouverts, totalement dérouté, je ne me sentais pourtant pas étranger ni isolé. »

« Notre langue n'est pas faite pour communiquer, elle est faite pour nous protéger. C'est le premier cercle concentrique, le plus redoutable ! »

Dénouement digne d'une tragédie antique, mais chut !!

Gros coup de cœur, une belle initiation à la culture japonaise.  

*Yubukiri: promesse

Quelques auteurs japonais cités par Richard Collasse:

Yukio MISHIMA
Le Pavillon d'or
Après le banquet
Le Marin rejeté par la mer



Junichiro TANIZAKI
Journal d'un vieux fou
Le grondement de la montagne


Yasunari KAWABATA
Les Belles Endormies, et non pas de Tanizaki comme écrit l'auteur dans ce roman...
Pays de neige

Soseki NATSUME
Le pauvre coeur des hommes

Shikibu MURASAKI Le Dit du Genji 

Les livres qui m'ont marqué... (pas tous chroniqués)

  • 'Beloved' & 'Jazz' de Toni Morrison
  • 'Charlotte' de David Foenkinos
  • 'Crime et châtiment' de Dostoievski
  • 'Kite runner' de Khaled Hosseini
  • 'La joueuse de go" de Shan Sa
  • 'Le quatrième mur' 'Profession du père' de Sorj Chalandon
  • 'Les enfants de Minuit' de Salman Rushdie
  • 'Sombre dimanche' & "L'art de perdre" d'Alice Zeniter
  • 'Sous le soleil des Scorta' et 'Eldorado' de Laurent Gaudé
  • "1984" de George Orwell
  • "Au Zénith" de Dong Thuong Huong
  • "Candide" de Voltaire
  • "En attendant Godot" de Samuel Beckett
  • "Fanrenheit 451" de Bradbury
  • "L'écume des jours" de Boris Vian
  • "L'insoutenable légéreté de l'être", de Milan Kundera
  • "L'œuvre au noir" de Marguerite Yourcenar
  • "L'ombre du vent" de Carlos Ruis Zafon
  • "La métamorphose" de Kafka
  • "La vie devant soi" de Romain Gary
  • "Le Hussard sur le toit" et "Les âmes fortes" de Jean Giono
  • "Le parfum" de Patrick Suskind
  • "Le Portrait de Dorian Gray" d'Oscar Wilde
  • "Le rouge et le noir" de Stendhal
  • "Les Cavaliers" de Joseph Kessel
  • "Les Déferlantes" de Claudie Gallay
  • "Les Raisins de la Colère" de John Steinbeck
  • "Malevil" de Robert Merle
  • "Mr Vertigo" de Paul Auster
  • "Sur la route" de Jack Kerouac
  • à suivre
  • L'univers de Haruki Murakami
  • Les contes d'Alessandra Barrico
  • Les polars de Fréd Vargas
  • Les romans de Sepulveda
  • Les romans de Yasunari Kawabata

Grand Canyon

Grand Canyon