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Liste par auteurs & titres dans Kronik list

samedi 30 avril 2022

484: 'Les gratitudes' de Delphine de Vigan

Genre : fin de vie dans la délicatesse

Histoire
Michka est atteinte d'aphasie, sous la forme où elle a une difficulté croissante à trouver ses mots qui évolue inéluctablement vers une perte totale de la faculté de s'exprimer. 
La vieille dame part en maison de retraite avec sa bouteille de whisky cachée sous ses pullovers...

Une femme et un homme l'accompagnent et lui donnent un peu de dignité: Marie la petite voisine, et Jérôme, l'orthophoniste dévoué qui l'aide à perdre ses mots moins vite.


Impressions
Une page de vies centrée sur celle de Michka qui doit quitter son chez-soi et accepter cette lente descente vers la décrépitude qui nous attend en fin d'existence.
Un passage difficile mais décrit dignement.

"Quelques minutes plus tard, une femme entre dans la chambre pour lui proposer une collation. Un petit jus de pomme avec une petite paille et un petit gâteau emballé dans un petit sachet. Les mêmes qu'au centre de loisirs.
Voilà donc ce qui t'attend, Michk' : des petits pas, des petits sommes, des petits goûters, des petites sorties, des petites visites.
Une vie amoindrie, rétrécie, mais parfaitement réglée

Soleil radieux dans cet univers, Jérôme se sent investi pour aider ces personnes qui déclinent, les accompagner 

"Je suis orthophoniste. Je travaille avec les mots et avec le silence. Les non-dits. Je travaille avec la honte, le secret, les regrets. Je travaille avec l’absence, les souvenirs disparus, et ceux qui ressurgissent, au détour d’un prénom, d’une image, d’un parfum. Je travaille avec les douleurs d’hier et celles d’aujourd’hui. Les confidences.
Et la peur de mourir.
Cela fait partie de mon métier.

Certain.e.s jugeront que Delphine de vigan surfe sur la vague des bons sentiments, et frise parfois la mièvrerie :
-  une vieille dame attachante
- un gentil orthophoniste qui s’occupe d’elle en voulant bien faire des heures sup,
- une voisine qui lui rend visite
Est-ce que le gentil épouse la mignonne à la fin ?...

Personnellement, c'est en effet un livre plutôt positif qui ne nous plonge pas dans les déviances maltraitantes de certains EPHAD d dénoncées par l'actualité de ces jours-ci.
C'est un récit qui se concentre sur le processus de la vieillesse et qui se veut un manifeste d'amour et de solidarité avec les proches qui vieillissent.
Parfois une récit habité de bons sentiments, cela fait du bien !

"Vieillir, c'est apprendre à perdre.
Encaisser, chaque semaine ou presque, un nouveau déficit, une nouvelle altération, un nouveau dommage. Voilà ce que je vois.
Et plus rien ne figure dans la colonne des profits."

Un livre court pour inviter à dire merci à ceux qui croisent nos routes, nous assistent et nous offrent leurs sourires. Une grande gratitude adressée à Delphine de Vigan pour ce roman touchant.

vendredi 29 avril 2022

483: ' Jours de sable' de Aimée de Jongh - BD

Genre : Bourrasques de grains de sable et de poussière

Histoire
Etats-Unis, 1937. John Clark, un photoreporter de 22 ans, est engagé par la Farm Security Administration, un organisme gouvernemental chargé d'aider les fermiers victimes de la Grande Dépression. Sa mission : témoigner, grâce à la puissance d'évocation de la photographie, de la situation dramatique des agriculteurs du Dust Bowl. Située à cheval sur l'Oklahoma, le Kansas et le Texas, cette région est frappée par la sécheresse et par des tempêtes de sable spectaculaires qui plongent les habitants dans la misère, poussant bon nombre d'entre eux à migrer vers la Californie.


Impressions
Superbe BD.

Le récit témoigne d'un épisode douloureux de l'Amérique profonde, mettant en avant la détresse humaine engendrée par la catastrophe écologique subie dans cette région des Etats-Unis.
Le « Dust Bowl », en 1937, résultat d'un élevage intensif et de pratiques agricoles appauvrissant les sols, d’intenses périodes de sécheresse ; au mitan des années 30, un vaste espace couvrant une partie de l’Oklahoma, du Kansas et du Texas subit d’impressionnantes tempêtes de sable. 







Le graphisme transcrit avec brio ces paysages soufflés par les tempêtes de sable et de poussières. Le dessin plus conventionnel des femmes et hommes qui survivent dans ce no-man's land nous renvoie vers le travail de photographies documentaires commandé par la FSA.
Et l'insert de photographies explicites, comme les suivantes trouvées sur le Net.






Pour cet album, Aimée de Jongh s'est rendue aux États-Unis et a effectué un long travail de recherche, relaté dans son blog voyage
https://aimeedejongh.wordpress.com/.../days-of-sand-the.../

vers quelques planches
https://www.aimeedejongh.com/joursdesable.html

Une BD à la fois émouvante et profonde. Un témoignage de la fragilité de notre écosystème et du lien fort entre les humains et la nature. Gros coup de cœur. 

jeudi 28 avril 2022

482: ' Tananarive' de Mark Eacersall et Sylvain Vallée - BD

Genre : crise d'ado du troisième âge

Histoire
Amédée, ancien notaire à la retraite, se délecte des récits de son ami et voisin Joseph, baroudeur de Tananarive à l'Indochine.
Cette amitié fusionnelle prend fin quand un arrêt cardiaque terrasse Jo.
Faute de trouver un testament, Amédée s'engage dans un road-trip pour identifier un légataire.


Impressions
Scénariste des Vieux Fournaux, une belle référence. Et ici aussi c'est le troisième âge qui est au cœur du récit habilement ficelé. Il reste qu'à mon goût le déroulé manque de piquant, bercé par un rythme un peu trop 'pépère'. 'Normal' vous direz de ne pas être emporté par une tornade de road-trip effréné avec Amédée ! 

Le graphisme est assez conventionnel mais superbe, tout en rondeur et avec des plans cinématographiques. J'ai apprécié en particulier d'astucieux fusion de paysages de jungle et ceux réels des régions Françaises que le notaire retraité traverse pour son enquête.
Les situations burlesques ne manquent pas, servies par ce décalage entre la vie paisible du couple retraité et les épisodes cocasses vécues par notre héros retraité en crise d'adolescence.

Une BD sympa à lire, une enquête qui se transforme sur une quête de soi.

dimanche 24 avril 2022

481: "Serpent majuscule' de Pierre Lemaître

Genre : gâchette facile

Histoire
' Avec Mathilde, jamais une balle plus haute que l’autre, du travail propre et sans bavures.' Mais il lui prend de faire une fantaisie lors d'une commande au lieu de ne tirer qu’une seule balle. Un écart aux protocoles qui bouscule l'ordre établi...

Impressions
Pierre Lemaitre publie son tout premier manuscrit, un polar écrit en 1985, en guise d'adieu à ce genre, un 'cadeau' à ses fans, mais on pourrait dire aussi pour faire du chiffre avec le label 'Lemaître', Goncourt 2013.
C'est un version très peu retravaillé que l'auteur publie, et le résultat se laisse lire avec fluidité, le rythme est soutenu, un grand nombre de passages sont comiques.
Les personnages sont caricaturaux, souvent grotesques, on ne pleure pas de les voir exécuté par Mathilde qui se rebelle contre ce monde machiste dominé par les hommes.

"L’effet positif de la colère, c’est que ça vous éloigne des morosités quotidiennes, c’est comme une parenthèse de vie dans l’océan des emmerdements."

"Le tueur est comme le commerçant, l’état d’urgence fait sa fortune"

Au delà de la cavalcade sauvage dans le monde des tueurs à gages, le thème de la vieillesse revient souvent comme un thème clé.

"Bien des hommes ont un problème avec l'âge. Soit ils refusent les années et ils sont pathétiques, soit ils les revendiquent et ils sont ridicules."

"Mathilde conduit très près du volant parce qu'elle a les bras courts. Elle a soixante-trois ans, elle est petite, large et lourde. En regardant son visage, on devine qu'elle a été belle. Très belle même. Sur quelques photos remontant à la guerre, c'est une jeune fille d'une grâce étonnante, silhouette souple, cheveux blonds encadrant un visage rieur et d'une grande sensualité. Aujourd'hui, bien sûr, tout a doublé, le menton, la poitrine, le derrière, mais elle conserve ces yeux bleus, ces lèvres minces et ce quelque chose d'harmonieux dans le visage qui demeure la trace de son ancienne beauté."

Cela reste une lecture de divertissement, pas de pensées profondes, de psychologies fouillées.
Ce roman m'a fait penser à  'Mamie Luger' de Benoît Philippon, chroniqué en novembre 2018, une vieille tueuse féministe avant-gardiste !


Grand défouloir. Un polar déjanté et loufoque qui distrait, mais pas un incontournable. 

lundi 18 avril 2022

480: 'Check-point' de Jean-Christophe Ruffin

Genre : huis clos mobile oppressant

Histoire
Hiver 1995. 
Un convoi de deux camions d'une association humanitaire de Lyon traverse la Bosnie en guerre. A bord: une femme et quatre hommes, tous de profils très différents qui vont connaître une ambiance délétère au cours de ce périple.

Impressions
Un roman qui m'a fait penser au film "le salaire de la peur". 
Des camions qui transportent des explosifs pour la version ciné, d'autres -dans le livre- qui acheminent des vivres, des médicaments et des vêtements.

En commun des univers mi-clos, où s'affrontent des personnalités fortes, et où la route chaotique et les exactions de la guerre mettent les voyageurs à rude épreuve autant que le spectateur.
"Des flaques écarlates s'étalaient sur les poitrines, coulaient des membres, étoilaient les têtes et formaient, sur la grisaille du décor et du ciel bas, comme autant de taches somptueuses.
... Dans ce paysage en deuil, la seule chose vivante était ce sang, qui sortait des morts."

En commun aussi, la tension générée par ces explosifs, qui sont au centre du thème du film et dont l'existence et l'importance apparaissent progressivement dans le roman.

L'intrigue étant surtout centrée sur  ce huis clos psychologique entre 5 humains. L'histoire d'amour entre Marc et Maud ne m'a pas transportée, trop caricaturale, sans compter sur la déception puérile de Lionel.
La haine entre Marc et Vauthier est en revanche plus subtile, une lutte entre dominants mâles semblables.
"- La haine, c'est le bonheur, tu ne sais pas ça encore, toi. C'est une passion, une raison de vivre.
C'est un vrai luxe. Le seul peut-être.
[...] - La haine, c'est aussi fort que l'amour. Sauf qu'on n'a pas besoin de demander son avis à l'autre."
La graduation de l'engagement entre les deux ex-militaires soulève la question du niveau d'intervention face à la brutalité et la souffrance de peuples voisins.
Ce roman interroge sur la guerre, sur le sens de l'aide humanitaire, sur les limites de ses actions. 
"Les salauds sont un produit de la guerre, pas sa cause. La plupart du temps, les véritables responsables, ceux qui déchaînent la violence et provoquent les guerres, sont des gens très bien. Des gens sincères, généreux, instruits."

Doit-on assister sans agir face aux massacres de civils ? 

Jusqu'où vont les bons sentiments ?
"Il se moquait pas mal de savoir comment vivaient les gens qu'ils allaient secourir. La seule chose qui lui importait, comme aux autres, ceux qui travaillaient au siège devant leur ordinateur, c'était d'avoir trouvé des " bénéficiaires ". Grâce à eux, l'association allait pouvoir recevoir l'argent de l'Union européenne et la machine caritative continuerait de tourner."

Un thriller humanitaire efficace. Intéressantes réflexions sur la guerre  et le sens des aides humanitaires par ce ex-médecin de MSF. Un peu déçu par la peinture de personnages assez caricaturaux.

samedi 9 avril 2022

479: "Madeleine résitante', T1, Madeleine Riffaud (Auteur), JDMorvan (Auteur), Bertail Dominique (Illustration) - BD

Genre : témoignage d'une femme de conviction

Histoire
Née en 1924, fille d'instituteurs, la petite Madeleine Riffaud grandit en Picardie. Elle rejoint la Résistance en 1942 à Paris en prenant le nom de code Rainer.
Premier tome de ce cycle de trois épisodes.

Impressions
Invitée par le scénariste Jean-David Morvan, Madeleine lui restitue aujourd'hui son parcours atypique, remontant le fleuve d'un vingtième siècle accidenté et chargé d'émotions...
Car il s'agit d'une femme exceptionnelle, au parcours incroyable où après la fin de la guerre, elle devient grand reporter, croise Vercors, Picasso, Hô Chi Minh... 

Pour accompagner le récit, le graphisme de Dominique Bertail transcrit une atmosphère puissante et prenante, colorée dans des nuances bleutées.
Décor d’abord rural puis montagnard, avec pour moi la découverte de l'existence d'un sanatorium à St Hilaire au pied de la Dent de Crolles dans le massif de la Chartreuse.

A notes l'insertion de poèmes de Madeleine Riffaud.

Une BD témoignage clé, écrite avec le concours de Madeleine Riffaud, résistante, poète, journaliste et correspondante de guerre française.

478: 'Le choeur des femmes' d'Aude Mermilliod - Bd

Genre : un médecin à l'écoute

Histoire
Jean Atwood, major de promo et interne à l'hôpital, doit faire un stage en soins gynécologiques aux côtés du docteur Karma, un médecin qui privilégie l'écoute des patientes aux actes purement médicaux.. Contraception, maternité, violences conjugales, avortements... de consultations en témoignages, Jean pourrait bien pourtant changer sa vision de la médecine.

Adaptation en bande dessinée d'un roman de Martin Winkler.


Impressions
Une Bd qui aborde les thèmes traités au quotidien par un médecin gynécologue: contraception, désir d'enfant, mais aussi des sujets  très inconfortables, tels que l'avortement, la violence conjugale, l'inceste, le viol...  Un récit qui présente parfois des scènes dures voire crues. 
Mais le graphisme est sobre et doux, le texte réaliste, et la bienveillance règne.


Ce thème de la bienveillance, et même de l'empathie, c'est la règle appliquée dans le service du Dr Karma. Au lieu de juger, les médecins aident. 

Une bienveillance et une acceptation véhiculées y compris vis à vis des personnes perdues quant à leur orientation sexuelle, vis à vis des personnes intersexes. Avec ce personnage central au look androgyne Jean en parfaite ambassadrice.

Une histoire sensible, autour de la sexualité principalement des femmes. Mais au final surtout un manifeste  à l'écoute et à la tolérance. Dessin sobre au service du récit.

samedi 2 avril 2022

477: 'Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce' de Corinne Morel Darleux

Genre : essai sur l'effondrement

Histoire
« Et si l'optimisme m'a depuis longtemps quittée, sur la marche du monde comme sur la nature humaine, la réflexion m'oblige à continuer, à ne pas faire sécession. Non dans l'espoir de victoires futures, je ne crois plus aux actions déterminantes qui pourraient tout changer et je doute de plus en plus que nous soyons en mesure de redresser la situation, non, si je reste concentrée ce n'est plus dans l'objectif de gagner un jour. Pas que j'ai le moindre goût pour les batailles perdues d'avance ou pour la marginalité politique, mais la lucidité acquise au fil des ans, couplée à l'effondrement qui vient, me souffle qu'il est vain de prétendre changer le monde. Tout juste peut-on tenter d'en préserver la beauté, en gage de notre humanité. Avant d'avoir tout saccagé. S'il faut continuer c'est pour ça, pour la dignité du présent ».













Impressions
Un message général simple: "Refuser de parvenir et restaurer la dignité du présent pour endiguer le naufrage généralisé."

Que l'auteure illustre par des références en particulier:

- au navigateur Bernard Moitessier, qui a participé en 1968 à la première course autour du monde, en solitaire et sans escale, le Golden Globe Challenge. Alors qu'il est annoncé vainqueur, il a renoncé à franchir la ligne d'arrivée, a abandonné la course et continué, toujours sans escale, en direction de l'océan Indien. A lire 'La longue route' de ce marin hors pair.

- à "Les racines du ciel" de Romain Gary, où le héros Morel, veut empêcher l'extermination des éléphants en Afrique. Une lutte à la fois pour la nature et pour les hommes, liant la défense des éléphants, l'indépendance, la sauvegarde des traditions.

Des réflexions personnelles en écho au parcours de cette auteure qui se qualifie d'écosocialiste.



Un essai au titre en beauté et à la personnalité gracieuse. Court et pertinent.

Les livres qui m'ont marqué... (pas tous chroniqués)

  • 'Beloved' & 'Jazz' de Toni Morrison
  • 'Charlotte' de David Foenkinos
  • 'Crime et châtiment' de Dostoievski
  • 'Kite runner' de Khaled Hosseini
  • 'La joueuse de go" de Shan Sa
  • 'Le quatrième mur' 'Profession du père' de Sorj Chalandon
  • 'Les enfants de Minuit' de Salman Rushdie
  • 'Sombre dimanche' & "L'art de perdre" d'Alice Zeniter
  • 'Sous le soleil des Scorta' et 'Eldorado' de Laurent Gaudé
  • "1984" de George Orwell
  • "Au Zénith" de Dong Thuong Huong
  • "Candide" de Voltaire
  • "En attendant Godot" de Samuel Beckett
  • "Fanrenheit 451" de Bradbury
  • "L'écume des jours" de Boris Vian
  • "L'insoutenable légéreté de l'être", de Milan Kundera
  • "L'œuvre au noir" de Marguerite Yourcenar
  • "L'ombre du vent" de Carlos Ruis Zafon
  • "La métamorphose" de Kafka
  • "La vie devant soi" de Romain Gary
  • "Le Hussard sur le toit" et "Les âmes fortes" de Jean Giono
  • "Le parfum" de Patrick Suskind
  • "Le Portrait de Dorian Gray" d'Oscar Wilde
  • "Le rouge et le noir" de Stendhal
  • "Les Cavaliers" de Joseph Kessel
  • "Les Déferlantes" de Claudie Gallay
  • "Les Raisins de la Colère" de John Steinbeck
  • "Malevil" de Robert Merle
  • "Mr Vertigo" de Paul Auster
  • "Sur la route" de Jack Kerouac
  • à suivre
  • L'univers de Haruki Murakami
  • Les contes d'Alessandra Barrico
  • Les polars de Fréd Vargas
  • Les romans de Sepulveda
  • Les romans de Yasunari Kawabata

Grand Canyon

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