Histoire
Benjamin Sachs est devenu un poseur de bombes. La question est posée et Peter Aaron, son ami, raconte.
Benjamin Sachs est devenu un poseur de bombes. La question est posée et Peter Aaron, son ami, raconte.
Impressions
La narration est classique en cela qu’elle commence par la fin et reprend tout de suite à un moment antérieur où se sont rencontrés les deux personnages principaux
Le corps du récit s'efforce de reconstituer le pourquoi de l’événement qui ouvre le livre.
Décor
Le décor est planté à New York, dans le Vermont et San Francisco. New-York bénéficie d'un traitement de faveur, Paul Auster oblige, et fait parfois partie des personnages.
P182 "Les explosions avaient métamorphosé New York en une ville spectrale, une métropole assiégée, et je savourais le délire fou du spectacle: le bruit incessant, les corolles de lumière éclatée, les couleurs flottant à travers d'immenses dirigeables de fumée."
Paul Auster aime planter ses récits dans le cours de l'histoire. Des repères jalonnent le roman, comme lorsque Peter liste les événements racontés dans le roman de Ben 'Le Colosse':
Message ?
Certaines critiques parlent d'un portrait d'une Amérique déboussolée qui perd ses valeurs. Un pays des coups tordus avec l'arrivée ce Ronald Reagan. Personnellement j'ai perçu la dimension politique comme plutôt mineure, en filigrane avec par exemple le passé activiste écologiste de Dimaggio. C'est à la fin du roman qui dévoile les dessous du Fantôme -l’engagement terroriste- que cette veine est la plus présente.
De là à faire le lien avec Léviathan ce monstre biblique marin à plusieurs têtes.
Selon Wikipedia, il peut être considéré comme l'évocation d'un cataclysme terrifiant capable de modifier la planète, et d'en bousculer l'ordre et la géographie, sinon d'anéantir le monde.
En fait le titre fait surtout référence à l'ouvrage éponyme de philosophie politique du britannique Thomas Hobbes (défendant un idéal despotique du pouvoir).
Personnages Les personnages féminins sont nombreux et très différents les uns des autres -Maria, Fanny, Iris, ..- tous remarquablement profonds et vrais.
Ce récit est avant tout un hommage à l'amitié -évidemment entre 2 écrivains bobos de New-York, le narrateur et Ben.
"Sachs n’avait pas d’emploi, et ça le rendait plus disponible que la plupart des gens que je connaissais, moins contraint par ses habitudes. La vie sociale à New-York tend à une grande rigidité. L’organisation d’un simple dîner doit se faire plusieurs semaines à l’avance, et les meilleurs amis peuvent parfois passer des mois sans le moindre contact. Mais avec Sachs, les rencontres impromptues étaient la règle."
Cette amitié motive le format de ce roman sous la forme de la biographie de Ben.
C’est aussi un roman de la quête de l'amour et sur le mariage, avec des personnages féminins forts, la mise en scène des interactions entre couples -tromperie, « échangisme » : l’un prend momentanément la place de l’autre, les couples s’inversent….
P167
"Je n'étais pas un être monogame, me disais-je. Je me sentais trop attiré par le mystère des premières rencontres, trop épris de la comédie de la séduction, trop avide de l'émotion de découvrir un corps, pour qu'on pût compter sur moi dans la durée.'
Sensualité
L'auteur prend plaisir également à colorer son récit de sensualité exprimée par ses personnages à la psychologie fouillée.
"Nous faisions l'amour en silence, intensément, vertigineusement pâmés au cœur de l'immobilité. Fanny était toute langueur et tout acquiescement, et je tombai amoureux de la douceur de sa peau, de sa façon de fermer les yeux quand je glissais derrière elle pour embrasser sa nuque."
"Maria était vêtue d’un short et d’un t-shirt, une tenue plus légère qu’à son habitude. Mais elle était sortie ce jour-là avec l’envie qu’on la remarque. Elle souhaitait affirmer la réalité de son corps, faire tourner les têtes, se prouver qu’elle existait encore aux yeux des autres. » ou encore « Je lui raconte des histoires. Ca fait partie d’un jeu que nous jouons. J’invente des histoires sur mes conquêtes imaginaires, et Fanny écoute. Ca l’excite. Les mots ont un pouvoir, après tout. Pour certaines femmes, il n’existe pas de meilleur aphrodisiaque."
Roman personnel ?
Après quelques recherches sur la toile, j'apprends que c'est aussi un roman plus personnel aussi qui retrace des épisodes de sa vie, en particulier la rencontre avec sa seconde femme, Siri Hustvedt ou encore l’artiste plasticienne, Sophie Calle (Personnage de Maria).
Extrait de Wikipedia sur Sophie Calle
"Après avoir été une activiste politique pure et dure — maoïsme, féminisme, Gauche prolétarienne, lutte pro-palestinienne au Sud-Liban, etc. — et avoir voyagé sept ans à travers le monde, Sophie Calle rentre à Paris. Perdue, sans projet professionnel, sans capacité précise, sans amis, elle décide de suivre des inconnus dans la rue, comme pour retrouver Paris à travers les trajets des autres. Bientôt, elle se prend au jeu, photographie, note ses déplacements, choisit un homme au hasard et décide de le suivre à Paris, puis à Venise. Plus tard, la remarque d’une amie sur la tiédeur des draps, lorsqu’elle se couche auprès d’elle, lui donne l'idée d'inviter des gens pris au hasard à venir dormir quelques heures dans son lit."
"Elle se caractérise par un esprit provocateur. Elle a été par exemple la première photographe à présenter une exposition… dont elle n'avait pas pris elle-même une seule photo : elle avait demandé à une agence de détectives privés de la prendre en filature et de la prendre en photo à son insu. Ce sont ces photos d'elle qu'elle exposa."
Roman culte de Paul Auster. Riche camaïeu de parcours de vie assez tordus. Un grand plaisir vécu à le relire.
Le corps du récit s'efforce de reconstituer le pourquoi de l’événement qui ouvre le livre.
Décor
Le décor est planté à New York, dans le Vermont et San Francisco. New-York bénéficie d'un traitement de faveur, Paul Auster oblige, et fait parfois partie des personnages.
P182 "Les explosions avaient métamorphosé New York en une ville spectrale, une métropole assiégée, et je savourais le délire fou du spectacle: le bruit incessant, les corolles de lumière éclatée, les couleurs flottant à travers d'immenses dirigeables de fumée."
Paul Auster aime planter ses récits dans le cours de l'histoire. Des repères jalonnent le roman, comme lorsque Peter liste les événements racontés dans le roman de Ben 'Le Colosse':
- Défaite de Custer à Little Big Horn
- Edification de la Statue de la Liberté
- Grève générale de 1877
- Exode des juifs de Russier en Amériques
- Invention du téléphone
- Emeutes du Hatmarket à Chicago
- Propagation du Ghost Dance chez les Sioux
- Massacre de Wouded Knee
Message ?
Certaines critiques parlent d'un portrait d'une Amérique déboussolée qui perd ses valeurs. Un pays des coups tordus avec l'arrivée ce Ronald Reagan. Personnellement j'ai perçu la dimension politique comme plutôt mineure, en filigrane avec par exemple le passé activiste écologiste de Dimaggio. C'est à la fin du roman qui dévoile les dessous du Fantôme -l’engagement terroriste- que cette veine est la plus présente.
De là à faire le lien avec Léviathan ce monstre biblique marin à plusieurs têtes.
Selon Wikipedia, il peut être considéré comme l'évocation d'un cataclysme terrifiant capable de modifier la planète, et d'en bousculer l'ordre et la géographie, sinon d'anéantir le monde.
En fait le titre fait surtout référence à l'ouvrage éponyme de philosophie politique du britannique Thomas Hobbes (défendant un idéal despotique du pouvoir).
Personnages Les personnages féminins sont nombreux et très différents les uns des autres -Maria, Fanny, Iris, ..- tous remarquablement profonds et vrais.
Ce récit est avant tout un hommage à l'amitié -évidemment entre 2 écrivains bobos de New-York, le narrateur et Ben.
"Sachs n’avait pas d’emploi, et ça le rendait plus disponible que la plupart des gens que je connaissais, moins contraint par ses habitudes. La vie sociale à New-York tend à une grande rigidité. L’organisation d’un simple dîner doit se faire plusieurs semaines à l’avance, et les meilleurs amis peuvent parfois passer des mois sans le moindre contact. Mais avec Sachs, les rencontres impromptues étaient la règle."
Cette amitié motive le format de ce roman sous la forme de la biographie de Ben.
C’est aussi un roman de la quête de l'amour et sur le mariage, avec des personnages féminins forts, la mise en scène des interactions entre couples -tromperie, « échangisme » : l’un prend momentanément la place de l’autre, les couples s’inversent….
P167
"Je n'étais pas un être monogame, me disais-je. Je me sentais trop attiré par le mystère des premières rencontres, trop épris de la comédie de la séduction, trop avide de l'émotion de découvrir un corps, pour qu'on pût compter sur moi dans la durée.'
Sensualité
L'auteur prend plaisir également à colorer son récit de sensualité exprimée par ses personnages à la psychologie fouillée.
"Nous faisions l'amour en silence, intensément, vertigineusement pâmés au cœur de l'immobilité. Fanny était toute langueur et tout acquiescement, et je tombai amoureux de la douceur de sa peau, de sa façon de fermer les yeux quand je glissais derrière elle pour embrasser sa nuque."
"Maria était vêtue d’un short et d’un t-shirt, une tenue plus légère qu’à son habitude. Mais elle était sortie ce jour-là avec l’envie qu’on la remarque. Elle souhaitait affirmer la réalité de son corps, faire tourner les têtes, se prouver qu’elle existait encore aux yeux des autres. » ou encore « Je lui raconte des histoires. Ca fait partie d’un jeu que nous jouons. J’invente des histoires sur mes conquêtes imaginaires, et Fanny écoute. Ca l’excite. Les mots ont un pouvoir, après tout. Pour certaines femmes, il n’existe pas de meilleur aphrodisiaque."
Roman personnel ?
Après quelques recherches sur la toile, j'apprends que c'est aussi un roman plus personnel aussi qui retrace des épisodes de sa vie, en particulier la rencontre avec sa seconde femme, Siri Hustvedt ou encore l’artiste plasticienne, Sophie Calle (Personnage de Maria).
Siri Hustvedt et Paul Auster
Extrait de Wikipedia sur Sophie Calle
"Après avoir été une activiste politique pure et dure — maoïsme, féminisme, Gauche prolétarienne, lutte pro-palestinienne au Sud-Liban, etc. — et avoir voyagé sept ans à travers le monde, Sophie Calle rentre à Paris. Perdue, sans projet professionnel, sans capacité précise, sans amis, elle décide de suivre des inconnus dans la rue, comme pour retrouver Paris à travers les trajets des autres. Bientôt, elle se prend au jeu, photographie, note ses déplacements, choisit un homme au hasard et décide de le suivre à Paris, puis à Venise. Plus tard, la remarque d’une amie sur la tiédeur des draps, lorsqu’elle se couche auprès d’elle, lui donne l'idée d'inviter des gens pris au hasard à venir dormir quelques heures dans son lit."
"Elle se caractérise par un esprit provocateur. Elle a été par exemple la première photographe à présenter une exposition… dont elle n'avait pas pris elle-même une seule photo : elle avait demandé à une agence de détectives privés de la prendre en filature et de la prendre en photo à son insu. Ce sont ces photos d'elle qu'elle exposa."
Roman culte de Paul Auster. Riche camaïeu de parcours de vie assez tordus. Un grand plaisir vécu à le relire.
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