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Liste par auteurs & titres dans Kronik list

dimanche 6 juillet 2025

604: 'Ce que je sais de toi' d'Éric Chacour

Genre : histoire d'un amour impossible

Histoire
Dans le Caire des années 1980, Tarek suit le destin tracé par son père -il devient médecin comme lui- et par sa famille -il épouse Mira et doit avoir des enfants.
Mais la rencontre d’un être que tout semble éloigner de lui va ébranler ce chemin nominal...


Impressions
Premier roman de cet auteur. Et quel auteur !!

Je suis conquis, tant par le style, la construction, la sensibilité, et la richesse des thèmes.

Style - L'écriture est ciselée, habile, sensible.

La construction en 3 parties, 'Toi', 'Moi' et  'Nous' est remarquable. Le tutoiement de la première partie m'a fortement intrigué mais j'ai ensuite compris la logique.

Sensibilité - Le drame réside dans cet interdit que Tarek a transgressé, décrit avec pudeur et délicatesse. Cette liaison interdite va tout bouleverser, et engendrer l'exil, le renoncement, l'étouffement de la vérité, le vide pour un fils, la faillite d'un clan.
"Je détestai ma famille de m'avoir tu cette vérité que tout le monde savait. Comme s'il suffisait de dissimuler les miroirs pour préserver un être difforme de sa propre laideur."

L'auteur ciselle ses observation des gestes ou des regards les plus infimes qui traduisent les non-dits et le sentiments cachés. Il décrit les faiblesses de la nature humaine avec finesse.
"On s'étonne encore de déceler une réaction puérile chez un de nos semblables, mais c'est une grossière erreur : il n'y a pas d'adultes au comportement d'enfant, il n'y a que des enfants qui ont atteint l'âge où le doute est honteux. Des enfants qui finissent par se conformer à ce que l'on attend d'eux : qui renoncent à la moindre remise en question, affirment sans plus trembler, méprisent la différence. Des enfants aux voix rauques, aux cheveux blancs, à l'alcool facile."
Et ce sont les femmes qui incarnent vaillamment la ­dignité qui n’abdique pas, quitte à manigancer ou mentir pour sauver la façade et l'honneur. Mais à quel prix...

Découvertes -
Lévantins - L'auteur nous invite dans cette communauté lévantine chrétienne égyptienne installée au Caire. Ces chrétiens issus de divers rites orientaux, originaires du Liban, de Syrie, de Jordanie ou de Palestine, et qui, bien qu'en Egypte depuis plusieurs générations, continuaient à y manier le français mieux que l'arabe.
Zabbalines - L'auteur inscrit également ce récit - et même l'histoire d'amour- dans le bidonville du Mokattam au Caire. 100 000 zabbalines, les chiffonniers collecteurs de déchets ou le « peuple des ordures »ramassent chaque matin 10 000 tonnes d’ordures ménagères directement chez les familles, en contrepartie d’une maigre rétribution, puis les ramènent jusque dans les zones de tri des bidonvilles à l’aide de camions, de charrettes ou de tuk tuks.
Odeurs du Caire
"Le cumin, la poussière (déjà), la coriandre, la benzine, les ânes, leurs déjections, le sable, la poussière (encore), la sueur, la cardamome, les gaz de combustion, les oignons frits, les ordures brûlées, les fèves chaudes, le jasmin, la poussière (obstinément), l’asphalte redevenu visqueux sous le règne sans partage du soleil. Le Caire était une entêtante présence olfactive qu’une infinité d’éléments composaient."


Roman coup de cœur. Envoutant et sensible. Sans l'once d'une hésitation, je recommande chaudement. 

Lauréat du prix Femina des Lycéens, ainsi que du Prix Première plume 

dimanche 29 juin 2025

603: 'Chien 51' de Laurent Gaudé

Genre : polar politico-criminel dans un contexte d’anticipation tendance dystopique.

Histoire
Zem Sparkas est grec mais depuis longtemps son pays n’existe plus: L’entreprise privée GoldTex l'a racheté.
Expatrié, il n’est plus qu’un vulgaire “chien”, un policier déclassé fouillant la zone 3 de Magnapole sous les pluies acides et la chaleur écrasante.
Un matin, dans ce quartier abandonné à sa misère, un corps retrouvé ouvert le long du sternum va l'entraîner vers les souvenirs d'amour et trahisons et dans les arcanes des luttes de pouvoir de cet état despotique. 


Impressions

Seul échappatoire à ce présent oppressant, c’est dans une salle sombre et sale que Zem plonge dans la drogue technologique Okios; pilules et lunette de réalité virtuelle, il s'évade pour retrouver l’Athènes de sa jeunesse. Il y perd tout ses repères pour déambuler dans les rues de ce paradis perdu. Scènes vraiment frappantes par leur contraste avec le présent, Laurent Gaudé peint des images d'Epinal d'un temps passé avec son brio coutumier.

L'autre point fort du roman réside dans ce binôme de Zem et Sofia, l'inspectrice de la zone 2, compagnons 'forcés' pour une longue et violente investigation. Pas d'angélique histoire d'amour, un duo de fortes personnalités qui se reniflent, se mordent, s'aiment et sombrent dans une même destinée bien noire.

Dystopie, enquête, mais alors quel est le thème principal de ce roman ? Une société imaginaire, à la Orwell?

Clairement le thème de la dystopie n'est pas approfondi, mais sert de toile de fonds, d'arrière-plan. Ces 3 zones infranchissables sans accréditation et le jeu Destiny m'ont rappelé la série Hunger Games. De manière similaire, les élites ont privatisé le monde, ils exploitent les ouvriers et ignorent les démunis, une coupole protège les zones 1 et 2 des pluies acides et des intempéries. Evidemment cette lecture m'a rappelé des scènes de romans de Damazio.
En synthèse, rien de très nouveau.
Je reconnais cependant que la force de l'écriture de Laurent Gaudé saisit par son réalisme. Cette peinture nous ramène au présent, évoque un demain qui ne serait en fait que le visage de nos égarements d’aujourd’hui.

C'est surtout le thème de la trahison et de la mort associée qui prédominent.
Avant les émeutes de Magnapole, Zem a connu en Grèce l’urgence de la révolte et l’espérance d’un avenir sans compromis. Il fut militant de la liberté, il a aimé et trahi.
Depuis son expatriation, il exécute les ordres, bon chien obéissant qui tente d'enfouir ses démons et de ne pas réagir devant l'injustice et la corruption quotidienne.
Ce roman interroge sur les conséquences de nos choix et de nos compromis, mais aussi sur la possibilité de se racheter et de trouver la rédemption.

La plume de Laurent Gaudé est toujours fluide, subtile et maîtrisée, l'intrigue est haletante et pleine de rebondissements.

Ambiance poisseuse et violente. Un très bon polar plutôt noir dans une ambiance dystopique.

mercredi 25 juin 2025

602: ' Ne le dis à personne' d'Halan Corben

Genre : bouche cousue

Histoire
    Pédiatre, David Beck exerce dans une clinique pour le compte de Medicaid, structure sociale qui prend en charge les pauvres sans couverture sociale. 
Sa vie a été brisée lorsque son épouse, Elizabeth, qu'il connaissait depuis l'enfance, fut assassinée par un tueur sadique qui marquait ses victimes au fer rouge.
    Huit ans après ce drame, il reçoit un étrange e-mail codé dont la clé n'était connue que de lui-même et d'Elizabeth…

Impressions
Série de chapitres courts et intrigue découpée en plusieurs histoires parallèles qui se rejoignent, des méchants parfois effrayants et des gentils qui survivent, l'horlogerie est bien huilée. "Capillotracté" parfois, rocambolesque souvent, mais l'intrigue a réussi à me tenir en haleine.

La motivation de cette lecture est d'expérience très intéressante de lire le roman après avoir regardé l'adaptation cinématographique. C'est un film réalisé par Guillaume Canet, sorti en 2006, où une brochette d'acteurs connus ont joué comme André Dussolier, François Cluzet, Kristin Scott Thomas, Jean Rochefort... Et j'ai apprécié ce film.

Transposition des Etats-Unis à la région parisienne et intra-muros.
Les 2 versions diffèrent sur l'assassin du fils du notable, mais chut, je ne le dis à personne.

Thriller bien construit, pas incontournable mais cette lecture permet de passer un bon moment.

Elle - Grand Prix des Lectrices - Policiers - 2003

lundi 16 juin 2025

601: "La nouvelle physique" de Yann Mambrini

Genre : 

Histoire
La Nouvelle Physique désigne ce qui devra succéder aux théories actuelles décrivant l’infiniment petit et l’infiniment grand, soit les deux modèles dits « standards », celui de la physique des particules, où règne la mécanique quantique, et celui de la cosmologie, domaine de la relativité générale.
L'auteur décrit les étapes franchies depuis un siècle vers cet objectif d’unification des deux théories.

Impressions
Le physicien vulgarisateur Yann Mambrini initie, de façon rafraîchissante, à des questions de physique non résolues.


Belle 

Prix Art, Société, Science du meilleur essai français 2024

jeudi 29 mai 2025

600: 'L'Intelligence artificielle : vers une domination programmée ?' de Jean-Gabriel GANASCIA

 Genre : 

Histoire
[4ième de couverture]

Aujourd’hui, les ordinateurs sont présents dans toutes nos activités quotidiennes. Une machine a vaincu le champion du monde du jeu de go, on construit automatiquement des connaissances à partir d’immenses masses de données (Big Data), des automates reconnaissent la parole articulée et comprennent des textes écrits en langage naturel… Les machines seraient-elles vraiment devenues intelligentes, posséderaient-elles un esprit, voire une conscience ?
La complexité de l’intelligence artificielle dépasse notre entendement immédiat et suscite nombre d’idées reçues. Ainsi, l’intelligence artificielle reproduirait l’activité de notre cerveau, elle ferait que les ordinateurs ne se trompent jamais et… qu’à terme nous en devenions les esclaves.
Jean-Gabriel Ganascia, en distinguant la réalité du pur fantasme, nous permet de comprendre ce qui se joue avec l’intelligence artificielle, quelles sont ses potentialités et ce qu’elle ne sera jamais… sauf au cinéma.

Suite à des études de physique et de philosophie, Jean-Gabriel Ganascia s’est spécialisé en intelligence artificielle puis en modélisation cognitive. Professeur à l’université Pierre et Marie Curie, il dirige l’équipe ACASA (Agents cognitifs et apprentissage symbolique automatique) au sein du laboratoire d’informatique de Paris-VI.




Impressions
Voilà un essai bien construit, sans digressions comme en a pâti le livre de Luc Julia chroniqué récemment.




Instructif et agréable à lire

lundi 26 mai 2025

599: 'Tempête sur Kinlochleven' de Peter May

Genre : Ambiance 'Shining' écossais

Histoire
- 2051 -
La perturbation des phénomènes climatiques s'est traduite par la transformation de l'Ecosse en une zone polaire avec un niveau des eaux qui a englouti de très grandes surfaces terrestres.
- Glasgow -
Le chef de l'inspecteur de police Cameron Brodie lui demande de se rendre dans les Highlands où le corps d’un journaliste d’investigation a été retrouvé dans un névé de la région du Loch Leven.
 

Impressions
C'est un polar dystopique, noir et multiforme.
Je reste dans la tonalité de 'La route', un peu moins désespéré tout de même.
Ici en Ecosse, il reste un semblant de gouvernement avec des élections, l'énergie est encore produite pour se chauffer, se déplacer, s'éclairer, et les hommes ne sont pas (encore ?) devenus des survivants cannibales.

Pour le reste, le tableau est bien chargé en noirceur.
Le flic de Glasgow est veuf, taciturne, désabusé, condamné à court terme au niveau santé (oups, je n'en dis pas plus), sans nouvelles de sa fille depuis le suicide de sa fille... n'en rajoutez plus !
Et donc en parallèle de l'enquête relative au cadavre congelé du pauvre bougre de journaliste, se dénouent les confessions de Cameron à sa fille. 
Les différents rebondissements pêchent par un excès d'invraisemblable. Le flic survit à une avalanche, survit à une noyade, survit à un énorme coup... Il se regarde dans un miroir et constate le visage ravagé, c'est le moindre qu'on puisse attendre.
Finalement c'est la partie de l'intrigue la plus sensible et sensée, parce que du côté de l'enquête officielle cela tourne au complot politique et carnage systématique.

Ce récit aborde également les thématiques du dérèglement climatique (l'auteur s'est référencé aux études du GIEC) qui s'accompagne d'une modification profonde de la géographie des terres émergées et de migrations humaines terribles,  de l'intelligence artificielle mal utilisée pour générer des vidéos "deep fake", et de la problématique du stockage des déchets nucléaires.

Enfin, Peter May est écossais et il excelle à croquer les paysages des Highlands terriblement beaux et terrifiants.


Polar noir. Avis mitigé. A ne pas lire un soir de déprime alors que la tempête fait rage...

samedi 24 mai 2025

598: 'Le Colonel Chabert' de Honoré de Balzac

Genre : Histoire de revenant

Histoire
Paris, février 1817, trois ans après la chute de l'Empire, l'avoué Derville reçoit la visite d'un vieillard misérablement vêtu. Il assure être le colonel Chabert, laissé pour mort à la bataille d'Eylau en 1807. Il avait alors contribué à la victoire en conduisant une charge de cavalerie devenue célèbre. Le vieil homme raconte comment, se réveillant dans un fossé entre des cadavres, il a survécu à ses blessures. Il revient dix ans après et souhaite réclamer son titre, faire valoir ses droits et revivre avec sa femme.  

Impressions
Soyons clair, cette lecture d'un classique n'a pas été  motivée par l'adaptation filmographique où Gérard Depardieu incarne le colonel. Film tourné en 1994, avec Fanny Ardan
t dans le rôle de la comtesse de Ferraud, Fabrice Luchini dans celui de l'avoué Derville. Malgré l'excellence du jeu de Depardieu, je ne supporte plus ce personnage abjecte par ses propos et son comportement.
Non, ce qui m'a donné envie de lire cet ouvrage est le roman 'Comme les Amours' de Javier Marias qui cite à de nombreuses reprises cette nouvelle de Balzac.
Et quel bonheur.

C'est la tragédie d'un brave colonel héroïque combattant dans les rangs de Napoléon, déclaré mort lors de la bataille d'Eylau et qui revient enfin réclamer justice.
'J'ai été enterré sous des morts, mais maintenant je suis enterré sous des vivants, sous des actes, sous des faits, sous la société tout entière, qui veut me faire rentrer sous terre !"
En effet, pour gagner un procès il faut de l'argent que le Colonel n'a pas. Revenu vivant du pays des morts il se retrouve comme mort au pays des vivants et dépourvu.
Et Balzac ne nous sert pas un dénouement bien juste.
Bijou ciselé, grand densité dramatique pour si peu de pages. 

Nouvelle courte et efficace. La densité du récit est impressionnante. Ah, les classiques !

Les livres qui m'ont marqué... (pas tous chroniqués)

  • 'Beloved' & 'Jazz' de Toni Morrison
  • 'Charlotte' de David Foenkinos
  • 'Crime et châtiment' de Dostoievski
  • 'Kite runner' de Khaled Hosseini
  • 'La joueuse de go" de Shan Sa
  • 'Le quatrième mur' 'Profession du père' de Sorj Chalandon
  • 'Les enfants de Minuit' de Salman Rushdie
  • 'Sombre dimanche' & "L'art de perdre" d'Alice Zeniter
  • 'Sous le soleil des Scorta' et 'Eldorado' de Laurent Gaudé
  • "1984" de George Orwell
  • "Au Zénith" de Dong Thuong Huong
  • "Candide" de Voltaire
  • "En attendant Godot" de Samuel Beckett
  • "Fanrenheit 451" de Bradbury
  • "L'écume des jours" de Boris Vian
  • "L'insoutenable légéreté de l'être", de Milan Kundera
  • "L'œuvre au noir" de Marguerite Yourcenar
  • "L'ombre du vent" de Carlos Ruis Zafon
  • "La métamorphose" de Kafka
  • "La vie devant soi" de Romain Gary
  • "Le Hussard sur le toit" et "Les âmes fortes" de Jean Giono
  • "Le parfum" de Patrick Suskind
  • "Le Portrait de Dorian Gray" d'Oscar Wilde
  • "Le rouge et le noir" de Stendhal
  • "Les Cavaliers" de Joseph Kessel
  • "Les Déferlantes" de Claudie Gallay
  • "Les Raisins de la Colère" de John Steinbeck
  • "Malevil" de Robert Merle
  • "Mr Vertigo" de Paul Auster
  • "Sur la route" de Jack Kerouac
  • à suivre
  • L'univers de Haruki Murakami
  • Les contes d'Alessandra Barrico
  • Les polars de Fréd Vargas
  • Les romans de Sepulveda
  • Les romans de Yasunari Kawabata

Grand Canyon

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