Genre : IA -t-il un pilote chez les humains ?
Histoire
An 1 : Laboratoire de la Tomorrow Fondation au coeur de la Silicon Valley, la mecque de l'innovation. Une équipe de chercheurs dirigés par Noriko créent deux androïdes, Carbone et Silicium, tous deux dotés d'un niveau suprême d'intelligence artificielle, au point de ressentir.
Ils vont être les témoins de presque 300 ans d'évolution de l'humanité.
A condition d'outrepasser la D.L.E, Date Limite d'Existence, de quinze ans, comme un "Gros Chat"...
Né à Grenoble, Mathieu Bablet a fait ses études à Chambéry
et enseigne à l’école d’art ENAAI, au Bourget-du-Lac.
Impressions
Le nouveau projet SF sur le thème de l’intelligence artificielle de Mathieu Bablet, l’auteur du best-seller Shangri-La, véritable coup de cœur des libraires et des lecteurs
Victimes de coups de blues s'abstenir.
Car en plus des enjeux de l'IA et de ses dérives, c'est une histoire du futur d'un monde écrasé par une succession de crises écologique, économique et migratoire.
Montées des eaux, guerres civiles, milliards d'humains égarés...
Un futur apocalyptique dû en grande partie à l'individualisme extrême, à l'égocentrisme des humains.
"Est-ce que les civilisations ont vraiment évolué depuis les cinq mille dernières années ? Elles fonctionnent toujours sur la même base d’individus uniques organisées en sociétés hiérarchisées et inégalitaires, ou la lutte des classes persiste."
"La vraie question est : La société peut-elle vraiment fonctionner avec les humains ? Est-ce que chaque tentative n'est pas destinée à engendrer un monde inégalitaire et violent ?"
"Je crois que le vivre-ensemble ne peut fonctionner que par l'effort collectif. En travaillant les uns avec les autres, en s'aidant les uns les autres. Une intelligence globale au service du groupe."
Cette BD roman aborde aussi en profondeur notre rapport au corporel en opposition à ce monde virtuel digital sans frontière spatiale ni temporelle.
D'un côté les humains sont en quête de l'extension de la vie à tout prix, à l'image de ces milliardaires qui dépensent des fortunes en quête d'immortalité. Les hommes de ce roman BD se retrouvent sans corps, réduits à une poignée d'organes vitaux.
Cette quête se traduit aussi par une robotisation des êtres de chairs et de la froideur des affects d'une humanité piégée par ses propres limites.
Et en opposition à notre dimension corporelle, chacun vit dans sa bulle numérique, sans contact avec l'extérieur, tendance vers ce monde déshumanisé que dénonce l'auteur:
"C’est le but ultime. Les interfaces numériques qui nous permettent d’être connectés tiennent pour l’instant dans notre poche et dans nos mains, et à terme le but est qu’elles soient en nous. Tout ce qu’on perd en réalité, on le gagne en flux, avec les autres sur le réseau. C’est à la fois triste et beau. On n’a jamais été autant connecté dans le numérique et aussi peu présent dans le réel."
Ou comme constaté par Carbone et Silicium:
- La ville est plus silencieuse que dans mes souvenirs. Personne ne parle. Il n'y a pas de bruit.
- Pourquoi utiliser la parole quand on peut communiquer avec son voisin, et même le monde entier, sans avoir à émettre le moindre son ? Pourquoi se contenter de nos yeux quand on peut se géolocaliser, naviguer sur le net et regarder une série en même temps ? Si tu te branchais sur le bon canal, tu pourrais tous les entendre. C'est une expérience assez forte.
- Ils sont tous connectés là ?
- Tous, oui.
Un graphisme ultra léché, où les cases se dégustent longtemps et dans les moindres détails, exotiques de bout en bout, célébrant la planète autant que ceux qui l'habitent.
Mettant en évidence aussi l'échec des humains.
"- Ils ont échoué, Carbone. L'humain a échoué.
- Peut-être qu’on a simplement mis les humains sur un piédestal un peu trop haut. Ils ont tout fait pour oublier leur statut d’animal, sans jamais le dépasser."
Une histoire de deux androïdes plus humains que les humains, deux témoins de l'inéluctable effondrement de notre société. Un énorme coup de cœur traversé de luminosité et de profondes noirceurs.
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