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Liste par auteurs & titres dans Kronik list

mercredi 27 août 2025

609: 'Comme un empire dans un empire' d'Alice Zeniter

Genre : doit-on abandonner la partie ?

Histoire
Hiver 2019.
Antoine est assistant parlementaire. L. elle est hackeuse. Ils ont tous les deux choisi de consacrer leur vie à un engagement politique, officiellement ou clandestinement. Antoine rêve d'écrire un roman sur la guerre d'Espagne. L vient d'assister à l'arrestation de son compagnon, accusé d'avoir piraté une société de surveillance, et elle se sait observée, peut-être même menacée. 
Antoine et L vont se rencontrer autour d'une question : comment continuer le combat quand l'ennemi semble trop grand pour être défait ?

Impressions
Cet autrice que j'apprécie énormément ici tente de décrypter les débats qui traversent la gauche et les nouveaux modes d’action politique qui émergent tandis qu’augmente la défiance envers les institutions

Alice Zeniter explique avec beaucoup de pédagogie et de précision les techniques de l'hacktivisme et rend passionnant et limpide ce qui pourrait être ennuyeux et complexe pour le profane. Elle croise astucieusement les deux couloirs narratifs et déploie son style remarquable.

Jeremy Hammond, 28 ans, a reconnu en mai avoir piraté en décembre 2011 le système informatique de la société texane Strategic Forecasting, surnommée Stratfor.

Phineas Fisher, "unidentified hacktivist and self-proclaimed anarchist revolutionary".

Cozy Bear, aussi appelé APT29, Nobelium ou Midnight Blizzard, est un groupe de hackers qui pourrait être lié aux renseignements russes, notamment le FSB[1]. Ce groupe cible des gouvernements, des partis politiques, des entreprises, des think tanks, etc.

L'unité 61398 de l'Armée populaire de libération, basée à Shanghai, est chargée de conduire des opérations militaires dans le domaine des réseaux informatiques.

Dans un rapport publié le 18 février 2013, la société de sécurité informatique Mandiant accuse cette unité de l'armée chinoise d'être à l'origine depuis 2006 d'une vaste opération de cyber-espionnage principalement contre des entreprises et organisations anglo-saxonnes. Le gouvernement chinois a immédiatement nié être à l'origine de ces cyberattaques.

Hiver 2019, Antoine Madec, l'un des quatre assistants d'un député socialiste, s'active au Palais Bourbon et prépare en parallèle un ouvrage sur la guerre d'Espagne et les légendaires photographes Robert Capa et Gerda Taro.



Roman 

vendredi 22 août 2025

608: 'La papèterie de Tsubaki' de Ogawa ITO

Genre : réconfortant et poétique

Histoire
Hatoko a vingt-cinq ans et la voici de retour à Kamakura, dans la petite papeterie que lui a léguée sa grand-mère. Le moment est venu pour elle de faire ses premiers pas pour prendre la relève, à la fois avec les métiers de vendeuse d'articles de papèterie et celui d'écrivain public. Un héritage familiale enseigné par l'Aînée, sa grand-mère exigeante et sévère.
 

Impressions

Je ferai le parallèle avec le monde sensible et poétique des BDs-mangas de Tanigushi.

Peinture du quotidien japonais, j'ai retrouvé ces détails de la vie de tous les jours, les gestes traditionnels (comme les célébrations annuelles dans les temples), l'amour de la cuisine.

"En attendant que l'anguille soit prête, il a commandé une bouteille de bière. Un ravier nous a été servi par la même occasion. Dedans, il y avait plein de foies d'anguille.
- Du foie confit à la sauce soja. Ça se marie bien avec la bière.
Il devait aimer ça car il plissait les yeux d'un air ravi."
Voilà une scène qui m'a rappelé un dîner inoubliable avec deux collègues (1 allemand et 1 coréen) dans un restaurant de Hamamatsu où j'ai découvert cette spécialité d'anguilles comme confites sur un lit de riz.. Hummm, à cette seule évocation je salive de bonheur. Sans oublier la serveuse en habits traditionnels qui a couru après nous dans la rue parce qu'on a avait réglé 20 centimes de trop !...

Le thème de la nourriture et du plaisir associé sont récurrents, comme le héros de 'Le gourmet solitaire' de Tanigushi que j'ai chroniqué en janvier 2024. 
"Dans l'air printanier encore un peu frais, j'ai savouré ma bière, les yeux arrachés à l'arbre."
"Mange amer au printemps, vinaigre l'été, piquant l'automne et gras l'hiver."
Rien d'étonnant, c'est un sujet de prédilection pour cette autrice à l'image de son premier roman "Le restaurant de l’amour retrouvé".


C'est un roman qui célèbre la contemplation et un art de vivre en opposition  avec l'ultra-modernité.
En écho au roman graphique Furari de Tanigushi, où au gré de pérégrinations, un cartographe et géomètre se promène dans le Japon de la fin XVIIIe siècle, à l’époque où Tokyo s’appelait encore Edo.


Hatako nous emmène visiter les sites de Kamakura, temples, la plage, les sanctuaires.
Le roman comporte d'ailleurs un petit plan dessiné des lieux cités.


Ce roman célèbre aussi l'écriture, la calligraphie, mais aussi le papier, l'encre, l'enveloppe, le timbre, tous ces éléments annexes qui constituent un message important de la lettre.

"Une belle écriture ne tient pas à une graphie régulière, mais à la chaleur, la lumière, la quiétude ou la sérénité qui en émanent."

Un exercice d'écrivain où le choix du système d'écriture joue aussi un rôle clé dans le message, un choix à faire entre les kanji ( des caractères chinois, dont la juxtaposition forme le mot, environ 50000 ), l'hiragana ( 50 caractères ), et le katakana ( 50 caractères, servant à écrire les mots d'origine étrangère, sortes d'alphabets phonétiques )
Popo rédige et calligraphie des cartes de vœux, des mots de condoléance, des lettres d'adieu aussi bien que d'amour. Un large éventail et à chaque une belle histoire humaine se dessine !


La papèterie, au cœur de ces sites, est un cocon, un lieu de partage avec les autres et le théâtre de réconciliations inattendues.
S'y croisent un panel de personnages très intéressants, comme Barbara, sa voisine, le Baron, un homme bourru mais généraux et attentionné, la petite fille d'un veuf...

Un roman qui fait du bien sans être mièvre.

dimanche 10 août 2025

607: 'Veiller sur Elle' de Jean-Baptiste Andrea

Genre : qui ne laisse pas de marbre...

Histoire
Michelangelo Vitaliani, dit Mimo, n'est pas né en 1904 sous les auspices d'une belle étoile, ni avec une cuillère d'argent dans la bouche. Au contraire, son père meurt durant la première guerre mondiale, sa mère s'en débarrasse en l'envoyant à Pietra d'Alba chez un pseudo cousin sculpteur qui l'exploite et le maltraite.
Mais parfois des destins se croisent, comme celui de Mimo avec Violla, cousine cosmique de Mimo car née  le même jour que Mimo (en trichant un peu sur les jours...) au sein de la famille puissante des Orsini.
Tous les deux souffrent; l'une d'anticonformisme et de capacités intellectuelles hors du commun dans un milieu patriarcal et conservateur, l'autre de sa pauvreté et d'achondroplasie qui le réduit à l'image d'un nabot aux yeux de ses pairs. 
Leur rencontre donnera naissance à une amitié forte, un amour platonique qui résistera aux troubles de l'Histoire et aux trajectoires de vie divergentes.
« - Nous sommes deux aimants. Plus nous nous rapprochons, plus nous nous repoussons. 
- Nous ne sommes pas des aimants. Nous sommes une symphonie. Et même la musique a besoin de silences. »


Impressions
Belle lecture. 581 pages (édition L'Iconoclaste) lue avec délectation.
Ce roman rentre dans la catégorie des livres que j'ai littérallement dévoré, impatient d'en poursuivre la lecture entre chaque pause.
Le rythme est effréné sur toute la longueur du récit, pas d'essoufflement, belle prouesse narrative ! 

Ce qui m'a plu:

L'amitié passionnelle qui fleurte avec l'amour (platonique) entre Mimo et Violla.
« Il m'a fallu quatre-vingt-deux ans, huit décennies de mauvaise foi, et une longue agonie, avant de reconnaitre ce que je savais déjà. Il n'y a pas de Mimo Vitaliani sans Viola Orsini. Mais il y a Viola Orsini, sans besoin de personne. »
Deux destins où des périodes de parfaite entente alternent avec des 

La traversée de l'histoire de l'Italie au XXème siècle.
Cette fresque romanesque s'inscrit dans une la Grande Histoire de l'Italie. Meurtrie par la première guerre mondiale, le Fascisme s'y installe petit à petit jusqu'à l'instauration du régime totalitaire mussolinien, et bientôt démarre une deuxième guerre mondiale qui s'achèvera par la défaite italienne.
Dans la description de la Marche sur Rome d'octobre 1922, l'auteur n'épargne pas le manque de courage de Benito: celui se joint au cortège qu'une fois assuré que le gouvernement n'enverra pas l'armée pour les arrêter...



L'assassinat puant du député Matteoti est plusieurs fois cité.
Le 10 juin 1924, le député socialiste Giacomo Matteotti, qui, au fil de ses discours au Parlement, pourfendait le gouvernement de Mussolini, fut jeté à bord d'une voiture par des inconnus qui le poignardèrent. On l'apprendra plus tard, les assassins appartenaient à une sorte de police parallèle et secrète du fascisme, la Tcheka, menée par un chef de bande du nom d'Amerigo Dumini. La Tcheka avait son siège au palais du Viminal, résidence du ministre de l'Intérieur dont le titulaire était Benito Mussolini...


L'antisémitisme et l'extermination dans les camps de concentration que le fascisme mussolinien soutient est également évoqué à de nombreuses reprises, clé de voute d'altercations fortes entre Mimo qui dit ne pas faire de politique, et Violla qui dénonce ces dérives avec véhémence. Mimo se retrouve confronté à la réalité quand Sarah, une collègue de la période de vie où Mimo a été recueilli par une équipe de cirque, est arrêtée et emprisonnée dans le Camp d'internement de Ferramonti di Tarsia, le plus grand camp d'internement (campo di concentramento) pour les internés juifs dans une région infestée de paludisme. 


La fin peu glorieuse de Mussolini n'est pas non plus épargnée, celui-ci ayant été arrêté le 28 avril 1945 par la résistance alors qu'il tentait de quitter l'Italie clandestinement.
Abattu, son corps finira -avec celui de 17 autres fascistes dont Clara Pietacci son amante- pendu par les pieds  par les pieds à la balustrade d'un distributeur d'essence de la Standard Oil. 

La passion de l'art est omniprésente. Sont abondamment cités Michel-Ange, Fra Angelico ou encore le Caravage.
Mimo rencontre également des artistes lors d'un séjour à Paris, et en particulier le sculpteur Brancusi.
Etonnamment, aucune image de sculpture de Vitaliani n'apparaît lors de recherches sur le Web, et toujours, la Pietà de Michelangelo Buonarroti prédomine.
J'ai appris qu'un illuminé du nom de Laszlo Toth a vandalisé à coups de marteau la Pietà de Michel-Ange en mai 1972. Durant son interrogatoire, il a affirmé que les mains du sculpteur avaient été guidées par lui, qu'il est Jésus de Nazareth, et souhaite faire disparaître tous les simulacres du Christ.

Seul petit bémol: l'écriture certes fluide et dynamique pèche un peu par un caractère trop lisse et polissé (influence du marbre ?). Mais est-ce un défaut ? Cela n'a pas nui au bonheur de la lecture de ce roman :)


Coup de cœur ! Un roman sculpté dans l'Histoire et la fiction.
Récompensé par le Prix Goncourt 2023, précédé du prix du roman Fnac

dimanche 27 juillet 2025

606: 'Paris-Briançon' de Philippe Besson

Genre : huis clos ferroviaire de la fatalité

Histoire
Rien ne relie les passagers montés à bord du train de nuit n° 5789. À la faveur d’un huis clos imposé, tandis qu’ils sillonnent des territoires endormis, ils sont une dizaine à nouer des liens, laissant l’intimité et la confiance naître, les mots s’échanger, et les secrets aussi.


Impressions
Conteur habile et fin observateur des âmes humaines.
Nos vies relèvent du hasard ou d'un destin tracé ?
Philippe Besson rend hommage aux trains de nuit et à ces rencontres fortuites qui peuvent changer une vie.
La lecture est agréable mais manque un peu de profondeur. 

Roman choral sobre et court. Idéal pour se distraire lors d'un trajet de train.

lundi 21 juillet 2025

605: 'Voltiges' de Valérie Tong Cuong

Genre : patatras

Histoire
Eddie et Nora Bauer forment un jeune couple flamboyant. À la tête d’un grand cabinet de conseil, Eddie assure à sa famille un train de vie très confortable. Quant à Nora, elle se partage entre la création de bijoux et l’éducation de Leni, adolescente promise à une brillante carrière d’athlète depuis qu’elle a été repérée par le charismatique entraîneur Jonah Sow. 
Eddie apprend que son associé l’a trahi, conduisant le cabinet à la faillite. Ruiné, il fait le choix de ne rien dire à Nora, ni à Leni, et multiplie les mauvaises décisions.


Impressions
J'ai vécu cette lecture comme tendue et inconfortable. La situation de cette famille se détériore inéluctablement, sans réactions fortes et franches, jusqu'à une fin qu'on devine bien noire.
Mais quelle message en tire-t-on ? 

Dans ce roman, Valérie Tong Cuong interroge nos choix de vie et nos renoncements à l’heure où tout vacille. 
Mais les turbulences vécues par le foyer idyllique qui explose sont très vite prévisibles au fur et à mesure qu'Eddie s'enfonce dans les dettes et le mensonge.
De plus les personnages très stéréotypés ne sont pas attachants, même Nora qui lasse par son dévouement et sa croyance en des jours meilleurs.
C'est excessivement caricatural, le père perdu, égoïste, menteur, la mère aimante, dévouée, l'entraineur gentil, dévoué ...

A cela s'ajoutent des phénomènes causés par le dérèglement climatique qui plongent le quotidien aux frontières du fantastique, comme par exemple avec ces animaux qui surgissent dans la ville. Difficile d'apprécier l'arrivée de ce thème dans un récit plutôt psychologique... Quelle intention ?

Roman pesant à lire, très loin de voltiges légères. Déception.

dimanche 6 juillet 2025

604: 'Ce que je sais de toi' d'Éric Chacour

Genre : histoire d'un amour impossible

Histoire
Dans le Caire des années 1980, Tarek suit le destin tracé par son père -il devient médecin comme lui- et par sa famille -il épouse Mira et doit avoir des enfants.
Mais la rencontre d’un être que tout semble éloigner de lui va ébranler ce chemin nominal...


Impressions
Premier roman de cet auteur. Et quel auteur !!

Je suis conquis, tant par le style, la construction, la sensibilité, et la richesse des thèmes.

Style - L'écriture est ciselée, habile, sensible.

La construction en 3 parties, 'Toi', 'Moi' et  'Nous' est remarquable. Le tutoiement de la première partie m'a fortement intrigué mais j'ai ensuite compris la logique.

Sensibilité - Le drame réside dans cet interdit que Tarek a transgressé, décrit avec pudeur et délicatesse. Cette liaison interdite va tout bouleverser, et engendrer l'exil, le renoncement, l'étouffement de la vérité, le vide pour un fils, la faillite d'un clan.
"Je détestai ma famille de m'avoir tu cette vérité que tout le monde savait. Comme s'il suffisait de dissimuler les miroirs pour préserver un être difforme de sa propre laideur."

L'auteur ciselle ses observation des gestes ou des regards les plus infimes qui traduisent les non-dits et le sentiments cachés. Il décrit les faiblesses de la nature humaine avec finesse.
"On s'étonne encore de déceler une réaction puérile chez un de nos semblables, mais c'est une grossière erreur : il n'y a pas d'adultes au comportement d'enfant, il n'y a que des enfants qui ont atteint l'âge où le doute est honteux. Des enfants qui finissent par se conformer à ce que l'on attend d'eux : qui renoncent à la moindre remise en question, affirment sans plus trembler, méprisent la différence. Des enfants aux voix rauques, aux cheveux blancs, à l'alcool facile."
Et ce sont les femmes qui incarnent vaillamment la ­dignité qui n’abdique pas, quitte à manigancer ou mentir pour sauver la façade et l'honneur. Mais à quel prix...

Découvertes -
Lévantins - L'auteur nous invite dans cette communauté lévantine chrétienne égyptienne installée au Caire. Ces chrétiens issus de divers rites orientaux, originaires du Liban, de Syrie, de Jordanie ou de Palestine, et qui, bien qu'en Egypte depuis plusieurs générations, continuaient à y manier le français mieux que l'arabe.
Zabbalines - L'auteur inscrit également ce récit - et même l'histoire d'amour- dans le bidonville du Mokattam au Caire. 100 000 zabbalines, les chiffonniers collecteurs de déchets ou le « peuple des ordures »ramassent chaque matin 10 000 tonnes d’ordures ménagères directement chez les familles, en contrepartie d’une maigre rétribution, puis les ramènent jusque dans les zones de tri des bidonvilles à l’aide de camions, de charrettes ou de tuk tuks.
Odeurs du Caire
"Le cumin, la poussière (déjà), la coriandre, la benzine, les ânes, leurs déjections, le sable, la poussière (encore), la sueur, la cardamome, les gaz de combustion, les oignons frits, les ordures brûlées, les fèves chaudes, le jasmin, la poussière (obstinément), l’asphalte redevenu visqueux sous le règne sans partage du soleil. Le Caire était une entêtante présence olfactive qu’une infinité d’éléments composaient."


Roman coup de cœur. Envoutant et sensible. Sans l'once d'une hésitation, je recommande chaudement. 

Lauréat du prix Femina des Lycéens, ainsi que du Prix Première plume 

dimanche 29 juin 2025

603: 'Chien 51' de Laurent Gaudé

Genre : polar politico-criminel dans un contexte d’anticipation tendance dystopique.

Histoire
Zem Sparkas est grec mais depuis longtemps son pays n’existe plus: L’entreprise privée GoldTex l'a racheté.
Expatrié, il n’est plus qu’un vulgaire “chien”, un policier déclassé fouillant la zone 3 de Magnapole sous les pluies acides et la chaleur écrasante.
Un matin, dans ce quartier abandonné à sa misère, un corps retrouvé ouvert le long du sternum va l'entraîner vers les souvenirs d'amour et trahisons et dans les arcanes des luttes de pouvoir de cet état despotique. 


Impressions

Seul échappatoire à ce présent oppressant, c’est dans une salle sombre et sale que Zem plonge dans la drogue technologique Okios; pilules et lunette de réalité virtuelle, il s'évade pour retrouver l’Athènes de sa jeunesse. Il y perd tout ses repères pour déambuler dans les rues de ce paradis perdu. Scènes vraiment frappantes par leur contraste avec le présent, Laurent Gaudé peint des images d'Epinal d'un temps passé avec son brio coutumier.

L'autre point fort du roman réside dans ce binôme de Zem et Sofia, l'inspectrice de la zone 2, compagnons 'forcés' pour une longue et violente investigation. Pas d'angélique histoire d'amour, un duo de fortes personnalités qui se reniflent, se mordent, s'aiment et sombrent dans une même destinée bien noire.

Dystopie, enquête, mais alors quel est le thème principal de ce roman ? Une société imaginaire, à la Orwell?

Clairement le thème de la dystopie n'est pas approfondi, mais sert de toile de fonds, d'arrière-plan. Ces 3 zones infranchissables sans accréditation et le jeu Destiny m'ont rappelé la série Hunger Games. De manière similaire, les élites ont privatisé le monde, ils exploitent les ouvriers et ignorent les démunis, une coupole protège les zones 1 et 2 des pluies acides et des intempéries. Evidemment cette lecture m'a rappelé des scènes de romans de Damazio.
En synthèse, rien de très nouveau.
Je reconnais cependant que la force de l'écriture de Laurent Gaudé saisit par son réalisme. Cette peinture nous ramène au présent, évoque un demain qui ne serait en fait que le visage de nos égarements d’aujourd’hui.

C'est surtout le thème de la trahison et de la mort associée qui prédominent.
Avant les émeutes de Magnapole, Zem a connu en Grèce l’urgence de la révolte et l’espérance d’un avenir sans compromis. Il fut militant de la liberté, il a aimé et trahi.
Depuis son expatriation, il exécute les ordres, bon chien obéissant qui tente d'enfouir ses démons et de ne pas réagir devant l'injustice et la corruption quotidienne.
Ce roman interroge sur les conséquences de nos choix et de nos compromis, mais aussi sur la possibilité de se racheter et de trouver la rédemption.

La plume de Laurent Gaudé est toujours fluide, subtile et maîtrisée, l'intrigue est haletante et pleine de rebondissements.

Ambiance poisseuse et violente. Polar noir dans une ambiance dystopique.

Les livres qui m'ont marqué... (pas tous chroniqués)

  • 'Beloved' & 'Jazz' de Toni Morrison
  • 'Charlotte' de David Foenkinos
  • 'Crime et châtiment' de Dostoievski
  • 'Kite runner' de Khaled Hosseini
  • 'La joueuse de go" de Shan Sa
  • 'Le quatrième mur' 'Profession du père' de Sorj Chalandon
  • 'Les enfants de Minuit' de Salman Rushdie
  • 'Sombre dimanche' & "L'art de perdre" d'Alice Zeniter
  • 'Sous le soleil des Scorta' et 'Eldorado' de Laurent Gaudé
  • "1984" de George Orwell
  • "Au Zénith" de Dong Thuong Huong
  • "Candide" de Voltaire
  • "En attendant Godot" de Samuel Beckett
  • "Fanrenheit 451" de Bradbury
  • "L'écume des jours" de Boris Vian
  • "L'insoutenable légéreté de l'être", de Milan Kundera
  • "L'œuvre au noir" de Marguerite Yourcenar
  • "L'ombre du vent" de Carlos Ruis Zafon
  • "La métamorphose" de Kafka
  • "La vie devant soi" de Romain Gary
  • "Le Hussard sur le toit" et "Les âmes fortes" de Jean Giono
  • "Le parfum" de Patrick Suskind
  • "Le Portrait de Dorian Gray" d'Oscar Wilde
  • "Le rouge et le noir" de Stendhal
  • "Les Cavaliers" de Joseph Kessel
  • "Les Déferlantes" de Claudie Gallay
  • "Les Raisins de la Colère" de John Steinbeck
  • "Malevil" de Robert Merle
  • "Mr Vertigo" de Paul Auster
  • "Sur la route" de Jack Kerouac
  • à suivre
  • L'univers de Haruki Murakami
  • Les contes d'Alessandra Barrico
  • Les polars de Fréd Vargas
  • Les romans de Sepulveda
  • Les romans de Yasunari Kawabata

Grand Canyon

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